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Depuis deux semaines, la série Adolescence, disponible sur Netflix, fait sensation auprès du public. Ce qui semblait être une simple enquête policière se révèle en réalité une mini-série profondément troublante. Elle expose avec force des thèmes lourds comme la violence et la haine des femmes. Au cœur de ce drame, on suit Jamie, un jeune garçon de 13 ans, influencé par l’idéologie masculiniste et le mouvement des incels, ces célibataires involontaires rejetés par les femmes et nourrissant un ressentiment profond à leur égard. Dans les quatre épisodes d’une heure chacun, Jamie est accusé d’avoir poignardé à mort une camarade de classe.
Ce qui bouleverse les spectateurs dans le monde entier, c’est la question fondamentale : comment un garçon aussi jeune peut-il en arriver à commettre un tel acte ? Le Dr Stéphane Clerget, pédopsychiatre, précise que les mécanismes psychiques chez ces jeunes sont similaires à ceux observés chez les adultes.
« On pense que parce qu’il s’agit d’un garçon tout juste sorti de l’enfance, il est presque impensable qu’il commette l’irréparable. Mais lorsqu’un pré-adolescent grandit dans la violence et sans repère paternel, des blessures narcissiques peuvent survenir. »
Dr Stéphane Clerget, pédopsychiatre.
Comprendre le mécanisme derrière le passage à l’acte
Au fil des quatre épisodes, la série déroule méthodiquement l’affaire. Au départ, l’innocence proclamée de Jamie, frêle pré-adolescent, laisse perplexe quant à sa culpabilité dans ce meurtre. Selon le Dr Clerget, il est rare qu’un adolescent de cet âge, sans antécédents familiaux, bascule dans la violence meurtrière.
« Dans la grande majorité des cas, les adolescents qui commettent des violences envers les femmes sont ceux qui grandissent sans repères familiaux. S’ils sont entourés de violence, avec un père alcoolique voire absent, une blessure narcissique va se créer. En assouvissant ses pulsions, ils chercheront à se venger. »
Dr Stéphane Clerget.
Le pédopsychiatre souligne l’importance de cette tranche d’âge, charnière entre enfance et adolescence, où l’estime de soi est souvent fragile. Entre 12 et 14 ans, les pré-adolescents sont en pleine mutation et peuvent réagir par la violence pour se protéger. C’est pourquoi il est crucial d’accompagner les jeunes durant cette période afin qu’ils ne se sentent pas abandonnés.
Quel est le rôle des réseaux sociaux dans le développement des adolescents ?
La série Adolescence met en lumière la place majeure des réseaux sociaux dans le quotidien des collégiens et lycéens. Cette dimension reflète la volonté des réalisateurs de montrer l’impact des réseaux sociaux sur le développement psychologique des jeunes.
Pour le Dr Clerget, un pré-adolescent évoluant dans un foyer où la communication est absente est davantage susceptible de se replier sur lui-même et de passer beaucoup de temps seul devant les écrans.
Dans la série, Jamie se referme sur lui-même suite au harcèlement qu’il subit ; il ne communique plus avec ses parents, abandonne son intérêt pour le dessin et s’immerge dans les réseaux sociaux et la communauté masculiniste des incels.
« Jamie est en proie à une mauvaise estime de lui-même, ce qui est courant à cet âge. Chez les adolescents, les réseaux sociaux renforcent l’importance de l’apparence, tout en accentuant le contraste avec ce qu’ils sont réellement. »
Dr Stéphane Clerget.
Comment repérer le mal-être de son enfant ?
La série, avec une fin à la fois douce et amère, invite à s’interroger sur la responsabilité des parents face aux actes de leurs enfants. Le Dr Clerget rappelle que, bien que les parents ne soient pas toujours responsables, ils ont un rôle primordial pour aider leur enfant à traverser son mal-être, particulièrement intense durant la pré-adolescence.
« Entre 12 et 14 ans, le pré-adolescent se confie moins aux parents et se méfie davantage des adultes. Les signes de mal-être ne s’expriment pas comme chez les adultes : ils ne pleurent pas forcément mais manifestent souvent leur douleur par de l’agressivité. »
Dr Stéphane Clerget.
Face à ces difficultés, il est essentiel d’être à l’écoute de son enfant et de continuer à partager des moments, notamment par des activités sportives ou artistiques. Encourager ses talents permet de renforcer sa confiance en lui. Au contraire, le brider ou le réprimer risquerait d’aggraver sa mauvaise estime de soi.