Home ActualitéBusinessEconomie et financeHonduras : Découvrez la cité libre où millionnaires prospèrent

Honduras : Découvrez la cité libre où millionnaires prospèrent

by Sara
Honduras, France

Crawfish Rock est un village des Caraïbes, aux apparences paradisiaques, situé sur la petite île de Roatan, au large du Honduras. Ici, les amandiers, les manguiers et les cannes à sucre bordent des plages à l’eau cristalline, où pullulent les crabes et les mérous. Les quelques centaines d’habitants vivent dans une grande précarité, la moitié de la population hondurienne subsistant avec moins de 6,50 euros par jour, étant majoritairement des descendants d’esclaves noirs.

Un développement économique inédit

Dans ce cadre, une centaine de magnifiques appartements, avec vue sur la baie de Saint John’s, sont proposés à partir de 100 000 dollars (environ 93 000 euros). Des espaces de coworking, de commerce, de restauration et de sport sont également en plein essor, formant un embryon de « centre-ville » qui se développe peu à peu. Un « centre bitcoin » a également été ouvert pour attirer de nouveaux investisseurs.

Un système réglementaire flexible

Dans un projet qui semble tout droit sorti d’un film d’anticipation, la clinique Nexus, portée par un groupe privé de Floride, propose des « voyages bien-être transformateurs pour les patients », incluant des thérapies géniques, des implantations sous-cutanées et des améliorations cybernétiques, prétendant offrir une nouvelle jeunesse cellulaire. Le message est clair : « Nous aidons les gens à devenir des cyborgs autosouverains. »

Les autorités de Tegucigalpa, la capitale du Honduras, ont « vendu » la souveraineté d’une petite enclave de l’île à une société internationale privée, Honduras Prospera Inc. (HPI). Cette entreprise gère une zone économique spéciale, appelée « Zede », visant à créer une cité libre, pratiquement indépendante des lois du pays d’accueil. Le règlement intérieur est édicté par HPI et s’applique à ses clients, qui sont également ses habitants.

Une utopie économique

Prospera se positionne comme l’une des plus avancées parmi ces « business utopies », attirant start-ups et millionnaires. Actuellement, 200 entreprises se sont installées, principalement virtuellement, sur ce petit territoire. Les entrepreneurs du monde entier peuvent y créer leur entité en ligne en moins d’une journée, bénéficiant d’un régime fiscal favorable et d’un système réglementaire flexible.

Pour environ 1 000 dollars (environ 930 euros), toute personne intéressée peut soumettre une candidature pour signer un « accord de coexistence », lui permettant ainsi de devenir résident permanent de cette enclave du capitalisme moderne. À ce jour, plus de 2 000 personnes ont visité le site, en attendant l’avancement de la construction de la ville.

Les enjeux derrière l’utopie

À terme, les futurs citoyens de Prospera pourront acheter des terrains ou des logements modulables écoresponsables, conçus par le célèbre cabinet d’architectes Zaha Hadid. Toutefois, le développement de Prospera reste relativement lent, et ses soutiens sont de plus en plus discrédités. Cette utopie néocapitaliste est fortement influencée par des idéologies libertariennes, provenant de cercles influents de la Silicon Valley.

Erick Brimen, un self-made-man originaire du Venezuela, dirige HPI. Les financements proviennent en grande partie d’un puissant fonds libertarien, Promonos, qui promeut des villes « à charte » à travers le monde. Ce modèle s’oppose aux institutions traditionnelles, vues comme obsolètes et corrompues.

Le soutien de figures controversées

Promonos soutient plusieurs projets similaires à travers le monde, tels que Praxis, Itana, et Metropolis. Ces initiatives cherchent à remplacer les gouvernements au nom de l’efficacité économique. Le conseil d’administration de Promonos abrite des libertariens notables, comme Patri Friedman, petit-fils de Milton Friedman, et des investisseurs influents tels que Peter Thiel.

Malgré un financement important, Prospera semble rencontrer des obstacles, notamment une opposition croissante des habitants de Roatan et un imbroglio juridique avec le gouvernement hondurien, qui a décidé d’abroger la loi sur les Zede. Ce texte, adopté sous une dictature, avait permis à HPI de signer une concession de cinquante ans en 2013.

Une réalité incertaine

Alors que les résidents de la « cité libre » continuent d’organiser des forums et des événements, l’avenir de Prospera demeure incertain. Le gouvernement élu en 2021 à Tegucigalpa a mis en question la légitimité de cette enclave, tandis que ses partisans s’accrochent à l’idée d’une société nouvelle, sans entraves institutionnelles. Le rêve d’une cité libertarienne au cœur des Caraïbes est donc à la fois fascinant et complexe, reflet des tensions contemporaines entre capitalisme et régulation.

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