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Washington. Les douze coups de minuit viennent à peine de retentir. Le président américain fanfaronne sur sa plateforme Truth Social : « Il est minuit !! Des milliards de dollars de droits de douane affluent maintenant vers les États-Unis d’Amérique ». À 06h01 (heure française), les États-Unis enclenchaient leur plus vaste offensive tarifaire depuis la Grande Dépression. Plus de 90 pays sont désormais visés par des surtaxes à l’importation, parfois multipliées par quatre, dans ce que Donald Trump présente comme « la grande réinitialisation du commerce mondial ».
Nouvelles taxes douanières en vigueur
Ce jeudi 7 août, les nouvelles taxes douanières américaines, fixées entre 15 % et 41 %, sont devenues effectives, après une semaine de suspense diplomatique. « C’est le début d’un nouvel ordre commercial, et la fin de l’ancien », tranche le _Financial Times_, pour qui « ces droits de douane ont bouleversé la donne ».
Réactions des pays affectés
Ceux qui pensaient échapper à la sanction se sont réveillés sonnés. La Suisse, le Canada, le Brésil ou encore le Laos ont été frappés sans distinction. Le gouvernement suisse, qui espérait une issue de dernière minute après une mission à Washington, a vu tomber un couperet : 39 % de taxe à l’entrée du marché américain. « Les Suisses auraient probablement dû camper à Washington », ironise un quotidien économique britannique. « Ils ne sont clairement pas contents. »
Même les pays ayant signé des accords, comme le Royaume-Uni, le Japon ou l’Union européenne, ont dû avaler la pilule. « Les partenaires commerciaux des États-Unis s’efforcent d’obtenir des exemptions aux nouveaux droits de douane massifs », écrit le _Wall Street Journal_.
Les cas les plus touchés
La palme de l’injustice revient peut-être au Brésil, visé à 50 % de taxes. L’_Associated Press_ rappelle que cette décision « a été largement motivée par le traitement réservé à Jair Bolsonaro », proche de Donald Trump, aujourd’hui poursuivi dans son pays. Même sort pour le Canada : 35 % de surtaxe pour avoir envisagé de reconnaître un État palestinien. « Donald Trump punit sans filtre, selon ses affinités ou rancunes politiques », observe le _Washington Post_.
Pourtant, ces pays lourdement sanctionnés peuvent presque s’estimer chanceux face à d’autres, bien plus vulnérables. Le Laos et l’Algérie, parmi les nations les plus pauvres concernées, écopent respectivement de 40 % et 30 % de surtaxes. Une sévérité qui choque, tant leurs économies sont fragiles.
Coûts pour les États-Unis
Officiellement, Donald Trump affirme que « l’Amérique est gagnante » et que les taxes rapportent des milliards. Mais pour les économistes, le calcul est tout autre. Le _New York Times_ alerte : « Les droits de douane de Trump sont désormais les plus élevés en près d’un siècle. » Le Budget Lab de Yale estime d’ailleurs que le coût moyen par foyer américain s’élève à 2 400 dollars par an, soit plus de 2 000 euros.
Les entreprises n’ont pas tardé à réagir. Walmart, Procter & Gamble, Nike, Ford ou encore Mattel ont déjà relevé leurs prix. L’_Associated Press_ prévient : « C’est une taxe sur la consommation, qui touche surtout les revenus les plus modestes. » Une inflation silencieuse mais généralisée, que CNN qualifie d’ »explosive » : « Les droits de douane, bien plus agressifs que ceux imposés jusqu’ici, pourraient aggraver les problèmes économiques déjà visibles, comme l’inflation et le ralentissement de l’emploi. » Et ce n’est pas fini. Les médicaments, les semi-conducteurs ou les équipements électroniques pourraient bientôt être visés.
Perspectives incertaines
Mais à quel prix ? Derrière l’effet d’annonce, la croissance est à la peine (à peine 1 % prévu au second semestre), l’inflation repart, et l’emploi manufacturier freine fortement. « La croissance ralentit. C’est déjà visible, et ça va empirer », prévient Mark Zandi, chef économiste chez Moody’s. Même les juges s’interrogent : une plainte de cinq entreprises et douze États contre ces surtaxes est en cours d’examen fédéral, et pourrait tout faire basculer. Car comme le résume le _New York Times_, la stratégie de Trump pourrait bien n’avoir « aucun vrai gagnant ».