Table of Contents
Au Mali, une série d’arrestations au sein des forces armées a visé au moins 55 militaires ces derniers jours, dont deux généraux, dans ce que les autorités présentent comme des mesures pour contrer une tentative de déstabilisation de la junte au pouvoir.
Au Mali, 55 arrestations dans l’armée depuis la semaine dernière
Depuis la semaine dernière, au moins 55 militaires, dont deux généraux, ont été arrêtés, ont indiqué des sources sécuritaires et des proches des personnes concernées. Ces interpellations se sont poursuivies dans la nuit de dimanche à lundi, selon ces sources contactées ce lundi 11 août par l’AFP. L’un des interlocuteurs a résumé la justification avancée :
« Il y a des arrestations liées à une tentative de déstabilisation des institutions »
Une autre source au sein de l’armée a déclaré que les autorités ont « procédé aux arrestations nécessaires » pour contrer une « tentative de déstabilisation » de l’État. Selon un membre du Conseil national de transition (CNT), l’organe législatif mis en place par la junte, « tous [les gens arrêtés] sont des militaires ». Ce législateur a ajouté que leur « objectif était de renverser la junte ».
La garde nationale et des officiers ciblés
Les arrestations ont principalement concerné la garde nationale, un corps de l’armée malienne. Parmi les personnes interpellées figurent des proches du ministre de la Défense, le général Sadio Camara, originaire de ce corps, bien que celui‑ci n’ait pas été inquiété à ce jour.
Parmi les hauts gradés arrêtés se trouve le général Abass Dembélé, une personnalité respectée dans l’armée et ancien gouverneur de la région de Mopti. Selon un proche, « Des militaires sont venus tôt [dimanche] pour arrêter le général Abass Dembélé, à Kati », en banlieue de Bamako. « On ne lui a pas dit pourquoi », a ajouté ce témoin.
Un autre témoignage cité par RFI décrit la manière des interpellations :
« Deux pickups remplis d’hommes en armes sont arrivés devant notre maison. Ils ont demandé à voir le colonel. Sans le brutaliser, ils sont repartis avec lui »
Parmi les personnes arrêtées figure aussi Nema Sagara, générale de brigade à l’état‑major de l’armée de l’Air, l’une des rares femmes à occuper un poste de haut grade au Mali. Une source sécuritaire malienne a ajouté que « des civils pourraient également bientôt être interrogés dans cette affaire ».
Silence du pouvoir et contexte sécuritaire
Au matin de lundi, le pouvoir en place n’avait pas communiqué officiellement sur la série d’arrestations et aucun élément précis sur les chefs d’accusation n’avait filtré. Un diplomate africain en poste à Bamako a évoqué ce « silence du gouvernement », qualifiant la situation de « complexe » et parlant d’une « loi de l’omerta ».
La junte, arrivée au pouvoir après deux coups d’État successifs en 2020 et 2021, a instauré depuis des restrictions importantes aux libertés dans un pays confronté à une profonde crise sécuritaire. Le Mali fait face depuis 2012 à des violences alimentées par des groupes affiliés à Al‑Qaïda et à l’organisation État islamique, ainsi que par des groupes criminels communautaires, dans un contexte aggravé par une grave crise économique.
La junte dirigée par le président Assimi Goïta s’est détournée de partenaires occidentaux, notamment la France, pour se rapprocher politiquement et militairement de la Russie. L’armée malienne et ses alliés, les mercenaires russes d’Africa Corps, chargés entre autres de traquer les djihadistes, sont régulièrement accusés d’exactions contre des civils. Début juillet, la période de transition a été prolongée de cinq ans ; Assimi Goïta pourrait donc rester à la tête du pays au moins jusqu’en 2030.