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Un rapport approfondi de l’OCDE alerte : l’objectif zéro net en 2050 reste théoriquement accessible, mais la fenêtre d’action se referme rapidement en raison d’un net ralentissement des politiques climatiques et d’un déficit de financement. Le document souligne que des mesures immédiates et ambitieuses sont nécessaires si l’on veut préserver la possibilité de limiter le réchauffement.
Contexte et principaux constats
L’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée et la première à dépasser en moyenne mondiale le seuil de +1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels.
Ce franchissement se traduit par une hausse de la fréquence et de l’intensité des événements météorologiques extrêmes, avec des conséquences directes sur la sécurité humaine et le bien‑être économique.
Depuis l’adoption de l’accord de Paris en 2015, des progrès ont été accomplis. Sous les politiques précédemment annoncées, la hausse prévue des températures pour 2100 était de l’ordre de +4,8 °C. Avec un renforcement des ambitions, ce scénario est désormais estimé entre +2,6 et +3,1 °C au cours du siècle.
Ralentissement des politiques climatiques
Le rapport alerte sur un ralentissement marqué de la dynamique politique mondiale. En 2022 et 2023, la sévérité des politiques climatiques n’a augmenté que de 1 à 2 % par an, contre une hausse moyenne annuelle de 10 % lors de la décennie précédente.
Ce recul est en partie lié à des reculs politiques dans certains pays, notamment aux États‑Unis, ce qui affaiblit l’effort collectif nécessaire pour atteindre l’objectif zéro net.
Potentiel d’atténuation et opportunités économiques
L’OCDE souligne que les barrières de coût pesant sur les énergies propres ont largement diminué, rendant plus accessible la réduction des émissions dans plusieurs secteurs.
Le rapport identifie des gains substantiels possibles dans :
- les secteurs du pétrole, du gaz et du charbon ;
- l’agriculture et la gestion des déchets ;
- la réduction des émissions de méthane (jusqu’à 85 mégatonnes d’ici 2030) ;
- le déploiement rapide d’énergies propres à court terme.
Le secteur de l’énergie offre les plus grandes opportunités immédiates pour accélérer la transition et réduire significativement les émissions.
Marché des technologies vertes et retombées
En 2023, la taille du marché mondial pour six technologies clés — solaire photovoltaïque, éolien, véhicules électriques, batteries, électrolyseurs et pompes à chaleur — a dépassé 700 milliards de dollars.
Selon le rapport, ce marché pourrait presque tripler d’ici 2035 avec des politiques soutenues, atteignant une envergure comparable aux récentes dimensions du marché du pétrole brut.
Les bénéfices attendus incluent :
- création d’emplois ;
- amélioration de l’accès à l’énergie ;
- renforcement de la sécurité énergétique ;
- amélioration de la santé publique grâce à la réduction de la pollution.

Financement : l’écart demeure colossal
Les investissements dans les énergies propres ont atteint 1,7 trillion de dollars en 2022, un montant important mais faible comparé à la formation brute de capital fixe mondiale de 26,4 trillions la même année.
Pour tenir l’objectif zéro net, l’OCDE estime qu’il faudrait au minimum porter les investissements annuels à 2,4 trillions de dollars d’ici 2030 dans les économies émergentes et les pays en développement, contre environ 600 milliards en 2022.
Le rapport chiffre l’écart de besoins des pays en développement à environ 1,7 trillion de dollars et critique le manque de solutions concrètes au‑delà des formules générales comme le « financement mixte ».
Adaptation : un impératif croissant
Face à l’accélération des impacts climatiques, le document insiste sur la nécessité d’intensifier les investissements d’adaptation.
Les besoins annuels mondiaux d’adaptation sont estimés à plusieurs centaines de milliards de dollars, tandis que les flux d’investissements recensés pour l’adaptation s’élevaient à seulement 76 milliards en 2022.
Le rapport fournit des orientations pratiques pour que les gouvernements agissent avec la rapidité, l’ampleur et la coordination requises.
Actions rapides à forte valeur ajoutée
L’OCDE met en avant des mesures immédiates à fort impact, comme la réduction rapide des émissions de méthane. Une baisse de 30 % des émissions de méthane d’ici 2030 pourrait diminuer le réchauffement mondial d’environ 0,2 °C d’ici 2050.
Le rapport précise que parvenir à l’objectif zéro net nécessitera non seulement le déploiement des solutions connues, mais aussi un apprentissage accéléré des meilleures pratiques et une volonté politique constante.
Selon l’OCDE, les décisions prises au cours des cinq prochaines années détermineront si l’humanité peut encore viser le seuil de 1,5 °C ou si elle devra accepter un avenir climatique plus incertain et dangereux.
Exigences politiques et risques
Le rapport souligne que les politiques industrielles vertes peuvent provoquer des distorsions si elles sont mal conçues : surcapacité, perturbations commerciales et autres risques doivent être anticipés.
Pour maximiser l’efficacité, ces politiques doivent être bien pensées, accompagnées d’un financement adéquat et d’un cadre réglementaire stable.
Mathias Cormann, secrétaire général de l’OCDE, rappelle que « pour combler l’écart entre l’ambition et la réalisation des engagements, nous devons améliorer nos performances et nous assurer que nous délivrons ce que nous promettons. »

Points clés à retenir
- L’« objectif zéro net » en 2050 reste théoriquement possible, mais la marge de manœuvre se réduit rapidement.
- Le ralentissement des politiques climatiques, notamment en 2022‑2023, met en péril les trajectoires favorables.
- Des gains majeurs sont encore réalisables, surtout dans l’énergie et la réduction du méthane.
- Un surcroît d’investissement et de financement ciblé est indispensable, en particulier pour les pays en développement.
- Les cinq prochaines années seront déterminantes pour savoir si l’on peut encore viser +1,5 °C.