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Le conclave, ce vote secret destiné à élire un nouveau pape, fascine depuis des siècles par ses rituels et ses mystères. Bien que popularisé récemment par le film « Conclave », ce processus recèle une riche histoire jalonnée d’anecdotes étonnantes. Voici dix faits marquants sur cette élection papale secrète, issus d’études historiques et de témoignages d’experts.
Le plus long conclave de l’histoire
Au XIIIe siècle, la succession du pape Clément IV s’est décidée après un interminable conclave de 1 006 jours, soit près de trois ans, ce qui constitue le record absolu. C’est également à cette occasion que le terme « conclave » – signifiant littéralement « sous clé » – a vu le jour, lorsque les habitants de Viterbe, excédés, ont enfermé les cardinaux pour hâter leur décision.
Ce vote secret, qui a conduit à l’élection du pape Grégoire X entre novembre 1268 et septembre 1271, est le premier exemple d’une élection papale par « compromis », résultat d’un long bras de fer entre deux factions médiévales majeures : les partisans de la papauté et ceux de l’Empire romain germanique.
La règle du « un repas par jour » imposée par Grégoire X
Pour accélérer le conclave, les habitants de Viterbe avaient même arraché le toit du bâtiment où les prélats étaient confinés, ne leur servant que du pain et de l’eau afin de les pousser à conclure rapidement. Suite à cette expérience, en 1274, Grégoire X a instauré une règle limitant les cardinaux à un seul repas par jour si le conclave durait plus de trois jours, puis à seulement du pain, de l’eau et du vin après huit jours. Cette contrainte a depuis été levée.
Le conclave le plus rapide
Avant 1274, certains papes étaient élus le jour même du décès de leur prédécesseur. Par la suite, un délai de dix jours a été instauré avant la première votation, puis étendu à quinze jours afin de permettre aux cardinaux d’arriver à Rome. Le conclave le plus court respectant cette règle fut celui de 1503, qui vit l’élection de Jules II en quelques heures seulement, selon l’historien du Vatican Ambrogio Piazzoni.
Plus récemment, le pape François fut élu en 2013 dès le cinquième scrutin, Benoît XVI en 2005 au quatrième et le pape Pie XII en 1939 au troisième.
Le premier conclave dans la chapelle Sixtine
Le premier conclave organisé sous le plafond peint par Michel-Ange dans la chapelle Sixtine remonte à 1492. Depuis 1878, cette chapelle mondialement célèbre accueille tous les conclaves. Selon le pape Jean-Paul II, « tout invite à la conscience de la présence de Dieu », dont chacun devra un jour rendre compte.
Les cardinaux élisentleur pape tout en séjournant à proximité, notamment à l’hôtel Domus Santa Marta.
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Des lieux alternatifs pour les conclaves
Si la majorité des conclaves ont eu lieu à Rome, certains se sont déroulés hors des murs du Vatican. Quatre ont été tenus dans la chapelle Pauline du palais du Quirinal, tandis qu’une trentaine d’autres se sont déroulés dans des églises comme Saint-Jean-de-Latran ou Santa Maria sopra Minerva. Quinze conclaves ont même eu lieu en dehors de Rome et du Vatican, notamment à Viterbe, Pérouse, Arezzo, Venise, mais aussi à Constance en Allemagne et à Lyon en France.
Les anti-papes, figures de division
Durant le Grand Schisme d’Occident (1378-1417), plusieurs prétendants rivaux au trône pontifical se disputèrent le titre de pape. Cette période conflictuelle a vu apparaître les fameux anti-papes, qui divisèrent l’Église catholique pendant près de quarante ans. Parmi les plus connus figurent Clément VII, Benoît XIII, Alexandre V et Jean XXIII. Le schisme prend fin avec le concile de Constance en 1417, qui élit Martin V, reconnu par tous.
Un défi sanitaire pour les cardinaux
Le confinement strict des cardinaux posait de sérieux problèmes d’hygiène et de santé. Avant la construction de la Domus Santa Marta en 1996, les électeurs dormaient sur des lits de camp dans des pièces adjacentes à la chapelle Sixtine. Selon l’historien Miles Pattenden, les conclaves des XVIe et XVIIe siècles étaient décrits comme « dégoûtants » et « malodorants », avec un risque élevé d’épidémies, surtout en été.
Le manque d’aération aggravait ces conditions, si bien que certains cardinaux quittaient le conclave malades, parfois gravement.
Un serment de secret strict
À l’origine, les élections papales n’étaient pas aussi secrètes. Mais le long conclave de Viterbe fit naître des craintes d’ingérence politique. Grégoire X ordonna alors que les cardinaux soient enfermés « cum clave » (sous clé) jusqu’à l’élection d’un nouveau pape. Ce dispositif visait à garantir un isolement total, permettant aux cardinaux de se concentrer uniquement sur leur mission, selon la volonté divine, à l’abri des pressions extérieures.
Au fil des siècles, les règles du conclave ont été renforcées pour assurer la confidentialité du vote.
Le plus jeune et le plus âgé des papes élus
Jean XII fut le pape le plus jeune, élu à seulement 18 ans en 955. À l’inverse, les plus âgés furent Célestin III (élu en 1191) et Célestin V (en 1294), tous deux proches de 85 ans. Benoît XVI avait quant à lui 78 ans lors de son élection en 2005.
Un pape élu sans être cardinal et des papes non italiens
Il n’est pas obligatoire d’être cardinal pour être élu pape, bien que ce soit la norme depuis des siècles. Le dernier cas remonte à 1378 avec l’élection d’Urbain VI, moine et archevêque de Bari.
Si la papauté a longtemps été dominée par des Italiens, plusieurs exceptions existent : Jean-Paul II (Polonais, 1978), Benoît XVI (Allemand, 2005), François (Argentin, 2013), mais aussi Alexandre VI (Espagnol, 1492), Grégoire III (Syrien, 731) et Adrien VI (Néerlandais, 1522).