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Conflit autour de l’expansion du Mosque de Nanterre en France
Un projet visant à agrandir un institut religieux soutenu par la municipalité de Nanterre fait face à une forte opposition de la part de la préfecture depuis six ans. Cette affaire est suivie de près par le préfet, un proche du ministre de la Justice, Gérald Darmanin, ainsi que par les médias de droite.
Selon un rapport d’Élias Ramdani, le président de l’Institut Ibn Badis, Rachid Abdouni, qui cherche à élargir le mosque de Nanterre en acquérant un terrain municipal adjacent, pense voir “la lumière au bout du tunnel” après six années de confrontations, de procédures judiciaires et de débats.
Un parcours semé d’embûches
Rachid Abdouni a lutté pendant 30 ans pour que les premières prières se déroulent “dans les sous-sols”, puis dans des bâtiments temporaires, avant d’aboutir à la construction du mosque, avec un accord municipal en 2008 et l’inauguration du lieu de culte en 2015. Actuellement, le mosque accueille deux mille fidèles chaque vendredi, alors qu’il ne peut en contenir que 1400.
En effet, Pierre Sublet, préfet des Hauts-de-Seine, avait écrit au maire de l’époque, Patrick Garrigues, que “ce statut ne semble pas durable”. L’association qui gère le mosque avait alors proposé d’acheter un terrain voisin, une ancienne école, et la municipalité avait donné son accord pour la vente.
Un climat politique changeant
Cependant, le climat politique a changé après la lettre du préfet, tout comme les figures clés. Gérald Darmanin a été nommé ministre de l’Intérieur, et son conseiller Laurent Hottiau est devenu préfet des Hauts-de-Seine. Un discours s’est alors développé contre “le séparatisme islamique”, et l’État a mobilisé ses ressources pour empêcher l’expansion du mosque de Nanterre.
La cour administrative a annulé les délibérations de mars 2021, jugeant que le prix de vente fixé par la municipalité (2,7 millions d’euros) était trop bas, masquant une forme de soutien déguisé de la part des autorités publiques à l’association religieuse. Ce même jugement a été répété en 2024, avec une réévaluation du bien à 3,4 millions d’euros.
Des doutes sur la confiance
Ce jeu juridique révèle une volonté de l’État de bloquer l’agrandissement du mosque, car “il n’est plus nécessaire” d’avoir un mosque supplémentaire dans la région, soutient une source au sein des services publics, malgré les 400 personnes qui ne peuvent être accueillies chaque semaine en raison du manque d’espace.
Un acteur clé de cette affaire admet que l’État éprouve un “manque de confiance” envers cette structure, citant des “liens entre le président de l’association et certaines réseaux préoccupants” et une “culture critique peu développée” au sein de l’école qui abrite le lieu.
Un regard critique sur le passé
Les médias du groupe Bouygues, évoquant des sources de haut niveau, font mention de la “position militante” de Rachid Abdouni, de ses “déclarations contre la République ou la collaboration” et de la “surveillance accrue” exercée par l’État sur le mosque Ibn Badis depuis plusieurs années.
Cependant, Rachid Abdouni se demande : “Il y a quelques années, nous étions reçus à la préfecture pour des petits-déjeuners sur la prévention de l’extrémisme. Nous communiquions régulièrement avec les services de renseignement. Ils nous connaissaient et nous n’avions pas de problèmes avec eux. Pourquoi sommes-nous soudainement devenus des ennemis irréconciliables de la République ? Je ne comprends pas ce double discours.”
Les implications politiques
Dans les cercles gouvernementaux, on évoque une “zone grise”, un concept d’islam qui ne peut être condamné en soi, mais qui suffit à justifier “l’inquiétude” des autorités. L’État exerce de multiples contrôles sur l’enseignement dans l’école et le collège associés à l’institut, avec environ 30 agents des services fiscaux, de l’inspection du travail et du parquet ayant visité l’établissement, selon Rachid Abdouni.
Parmi les principaux acteurs du dossier, le préfet Alexandre Bouger incarne les critiques des partisans de l’extension, qui voient dans le refus de l’État un signe de motivation politique, sachant qu’il était jusqu’à l’été 2024 le chef de cabinet de Gérald Darmanin au ministère de l’Intérieur.
Vers une issue possible
Rachid Abdouni déplore “l’influence de l’extrême droite sur la vision des autorités publiques vis-à-vis de l’islam en France”, tandis que le maire Rafael Adam exprime sa colère, tout en refusant de considérer les actions du préfet comme une campagne personnelle, affirmant qu’il “représente le gouvernement et qu’il a des instructions”.
Maintenant que le bien appartient à la municipalité, à moins qu’il n’y ait une nouvelle attaque juridique de la part du préfet, la vente du bâtiment et l’extension du mosque seront validées dès la signature du permis de construire. Le maire assure : “Nous continuerons notre engagement. Nous pouvons dire que nous avons tenu bon, au nom du respect de notre parole et du principe de la laïcité.”