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Alors que le débat sur la fin de vie, incluant la création d’un « droit à l’aide à mourir », a repris lundi 12 mai dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, les députés souhaitent des échanges respectueux et constructifs. Ces discussions s’annoncent cruciales pour aboutir à une législation équilibrée sur un sujet profondément intime et sensible.
Un débat respectueux pour deux propositions de loi
Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, s’est engagée à garantir que les débats restent « les plus respectueux possible ». Pendant deux semaines, y compris le week-end si nécessaire, les députés examineront deux propositions de loi distinctes : la première porte sur les soins palliatifs, la seconde sur l’aide à mourir. Un vote solennel est prévu pour chacune le 27 mai.
Olivier Falorni, rapporteur du texte sur l’aide à mourir, a défendu ce dernier comme « un ultime recours », soulignant que « oui, il y a encore pire que la mort, quand la vie n’est devenue qu’une inexorable agonie ».
Des témoignages personnels au cœur des débats
Plusieurs députés ont partagé leurs expériences personnelles, illustrant l’enjeu humain de la question. Karen Erodi, députée « insoumise » du Tarn, a évoqué « la dégradation irréversible, le maintien en vie sans consentement, dans la douleur » au sein de sa propre famille.
Soins palliatifs : vers un droit opposable
La première proposition de loi, relativement consensuelle, vise à instaurer un « droit opposable » aux soins palliatifs. Cette mesure fait écho à un rapport de la Cour des comptes de juillet 2023, qui révélait que seule la moitié des besoins en soins palliatifs était actuellement couverte. L’Assemblée a commencé à examiner le premier article, destiné à clarifier le concept même de soins palliatifs.
Le Premier ministre, François Bayrou, a opté pour deux textes distincts, contre un seul en 2024, afin de permettre aux députés de voter indépendamment sur chaque sujet. Cependant, la majorité des interventions concernant les soins palliatifs, notamment à droite et à l’extrême droite, ont anticipé le débat sur l’aide à mourir, défendant notamment des amendements (rejetés) affirmant qu’il ne peut y avoir de « continuum entre les soins palliatifs et le suicide assisté ».
Des députés du centre et de la gauche ont appelé à isoler ces débats respectifs, afin de ne pas « importer » les controverses liées à l’aide à mourir dans les discussions sur les soins palliatifs.
Une proposition d’aide à mourir plus controversée
Le second texte, plus clivant, a été adopté en commission par 28 voix contre 15. En séance, les groupes parlementaires devraient accorder une liberté de vote à leurs membres. Les députés devront examiner plus de 3 000 amendements, dont une majorité issue du groupe Union des droites pour la République d’Éric Ciotti, allié au Rassemblement national.
Alors que La France insoumise accuse une tentative d’« obstruction » de l’extrême droite, la présidente Braun-Pivet a relativisé, rappelant que le volume d’amendements est comparable à celui des débats en 2024.
Les enjeux éthiques et les lignes rouges
Le projet de loi sur la fin de vie, dont les grandes lignes avaient été présentées en mars 2024 par Emmanuel Macron, avait été interrompu par la dissolution de l’Assemblée. Le 5 mai, le président de la République a réaffirmé son engagement, insistant sur la nécessité de dépasser un débat binaire « pour ou contre la vie » afin de s’interroger sur le « moindre mal ».
Philippe Juvin, député LR et médecin, s’est opposé à toute implication de l’État dans la mort d’un tiers, qualifiant ce principe d’« absolu ». Il redoute que le texte ouvre la voie à l’euthanasie pour des personnes susceptibles de vivre encore plusieurs années.
À l’inverse, Océane Godard (Parti socialiste) estime que la loi « autorisera le recours au droit à mourir sans perdre ce caractère d’exception et sans l’encourager ».
La ministre de la Santé, Catherine Vautrin, a appelé à définir un « cadre clair avec des principes non négociables et des lignes à ne pas franchir », soulignant l’importance pour le Parlement de trouver un « point d’équilibre » sur ces questions sensibles.
Critères et garde-fous pour l’aide à mourir
Le débat portera notamment sur les critères d’accès à ce droit, les « garde-fous » encadrant la procédure, la collégialité de la décision d’autorisation, ainsi que la priorité à donner à l’auto-administration de la substance létale.
Le texte de M. Falorni précise désormais que le patient doit être « atteint d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, engageant le pronostic vital, en phase avancée ou terminale ».
La Haute Autorité de santé a défini la « phase avancée » comme « l’entrée dans un processus irréversible marqué par l’aggravation de l’état de santé qui affecte la qualité de vie ». Le gouvernement prévoit d’intégrer cette définition par amendement.
Mobilisations et suite des débats
En marge des débats, une centaine de personnes se sont rassemblées aux abords de l’Assemblée nationale à l’appel de l’association Alliance Vita, pour protester contre le « droit à l’aide à mourir ».
Les discussions reprendront mardi en fin d’après-midi, alors que l’Assemblée nationale s’apprête à affronter un dossier majeur mêlant questions d’éthique, législation et pratiques médicales.