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Négociations entre Kâbol et Washington pour un échange de prisonniers
Kâbol – Le porte-parole du gouvernement afghan, Hamdullah Fetrat, a confirmé que son gouvernement négocie avec les États-Unis pour parvenir à un accord sur l’échange de citoyens américains détenus en Afghanistan contre un prisonnier afghan arrêté par la CIA au Pakistan avant d’être transféré à Guantanamo en 2008.
Le prisonnier, Mohammad Rahim, est l’un des trois détenus restants à Guantanamo qui n’ont jamais été inculpés. Les États-Unis l’ont présenté comme un conseiller, intermédiaire et agent exécutif de l’ancien leader d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, et d’autres hauts responsables de l’organisation. Malgré ses 17 ans passés à Guantanamo, aucune preuve publique n’a été présentée contre lui.
Une délégation des Talibans, y compris Mohammad Nabi Omari, ancien détenu à Guantanamo, lors des pourparlers sur le dialogue afghan interne en 2019 (AFP)
Développement des négociations
Les autorités américaines tentent de convaincre les Talibans de libérer des Américains, à savoir Ryan Corbett et Mahmoud Habibi, qui ont été arrêtés par les services de renseignement afghans en août 2022, ainsi qu’un troisième, George Glizman, qui a été arrêté plus tard cette même année alors qu’il visitait l’Afghanistan pour le tourisme.
Hamdullah Fetrat a déclaré à Al Jazeera que des négociations intensives avaient été menées avec le côté américain pour libérer des citoyens afghans de Guantanamo. Il a affirmé que « les négociations n’ont pas encore progressé, et notre gouvernement essaie de libérer les détenus afghans des prisons américaines et autres. Jusqu’à présent, nous nous sommes réunis plus de trois fois pour parvenir à un accord sur l’échange de prisonniers. »
Les négociations entre Kâbol et Washington ont commencé en juillet dernier après que l’administration du président américain Joe Biden a décidé de réduire le nombre de prisonniers à Guantanamo, après avoir envoyé 11 détenus yéménites à Oman.
Propositions et obstacles
Selon des sources gouvernementales afghanes, les États-Unis ont accepté de libérer Rahim en échange des trois citoyens américains, mais les Talibans ont proposé un accord différent, impliquant la libération de deux autres prisonniers afghans en échange de Glizman et Corbett, tout en niant détenir Mahmoud Habibi dans leurs prisons.
Mahmoud Habibi s’adressant aux médias lors d’une conférence de presse organisée par le Centre des médias gouvernementaux en Afghanistan.
Les experts en affaires afghanes estiment que les États-Unis exigent la libération de leurs citoyens dans le cadre d’un accord global, en soulignant que le déni des autorités afghanes sur l’existence de Habibi dans leurs prisons pourrait entraver le processus.
Contexte et précédents d’échanges
Habibi a été arrêté en août 2022 à Kâbol, sans que les Talibans ne déclarent la raison de son arrestation, bien que des sources de sécurité aient confirmé qu’il était impliqué dans l’assassinat du leader d’Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri.
Un membre de la famille de Habibi, souhaitant rester anonyme, a déclaré à Al Jazeera que « Habibi a été arrêté avec 31 de ses collègues, dont certains ont été libérés peu après, et après trois mois, son chauffeur et un ingénieur ont été libérés ». Ils ne savent rien du sort de Mahmoud, ajoutant que « Washington ne libérera pas Mohammad Rahim à moins que Habibi ne soit d’abord libéré ».
Habibi a été directeur de l’Autorité de l’aviation civile sous l’ancien président Ashraf Ghani, avant de partir pour les États-Unis et revenir après le retrait américain d’Afghanistan, où il a ouvert une entreprise privée spécialisée dans la gestion des radars de l’espace aérien afghan.
Analyser les implications
Le chercheur politique Hikmat Jalil a déclaré à Al Jazeera que « l’enlèvement d’étrangers – en particulier des Américains – a été une partie importante de la stratégie des mouvements armés, notamment des Talibans, dans leur guerre contre les États-Unis. Cela leur a permis d’imposer leurs conditions dans les négociations et de libérer leurs détenus. »
Jalil a noté que c’est la première fois que les Talibans annoncent qu’ils négocient avec l’administration américaine concernant les détenus, considérant cela comme un message au président américain élu, Donald Trump, qu’ils sont prêts à négocier sur d’autres questions, le considérant comme un homme des affaires.
Les experts en affaires afghanes soulignent que ce n’est pas la première fois que les Talibans et les États-Unis concluent un accord d’échange de détenus. Si cet accord est conclu, ce sera le deuxième depuis l’arrivée des Talibans au pouvoir, et le septième au cours des deux dernières décennies. Parmi ces échanges, trois ont eu lieu pendant la présence des forces américaines en Afghanistan. Voici quelques détails sur ces précédents échanges :
- En 2007, libération de 23 Sud-Coréens enlevés lors d’une mission humanitaire, en échange d’une rançon après trois jours de négociations.
- La même année, un journaliste italien a été échangé contre la libération de cinq membres des Talibans.
- En 2013, les Talibans ont libéré l’ancienne parlementaire afghane Fariba Kakar, en échange de dix détenus des Talibans, dont quatre femmes.
- Le cas le plus célèbre est l’échange du soldat Bowe Bergdahl, enlevé en juin 2009, qui a été libéré en 2013 contre la libération de cinq hauts responsables des Talibans de Guantanamo.
- Suite à l’accord de Doha entre les Talibans et Washington, les Talibans ont libéré en 2019 une Américaine et une Australienne en échange d’Anas Haqqani, frère du ministre de l’Intérieur afghan, et du vice-président des Talibans, Sirajuddin Haqqani.
- Une dernière affaire a concerné Bashir Noorzai, proche du fondateur des Talibans, le mollah Mohammad Omar, qui a été libéré en 2022 contre l’ingénieur américain Mark Frerichs.