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Pour la première fois en trois décennies, les États‑Unis sont absents d’une représentation officielle de haut niveau à la conférence climatique annuelle des Nations unies, COP30, organisée cette année au Brésil. Dans ce vide diplomatique, la Chine a occupé le devant de la scène, s’imposant comme un acteur central de la lutte contre le réchauffement climatique et redéfinissant la diplomatie climatique mondiale.
Contexte et retrait américain
Le retour de Donald Trump à la présidence a marqué un tournant : il a longtemps remis en question le changement climatique, qualifiant parfois le phénomène de « supercherie ». Sous son mandat précédent, les États‑Unis s’étaient retirés de l’accord de Paris et avaient soutenu des mesures favorisant l’industrie des combustibles fossiles.
Cette année, la Maison Blanche a déclaré qu’elle ne compromettrait pas « la sécurité économique et nationale » au nom d’objectifs climatiques, selon la porte‑parole Taylor Rogers. Les critiques estiment toutefois que l’absence de Washington affaiblit une capacité historique à fédérer les négociations internationales.
- Retrait antérieur des États‑Unis de l’accord de Paris.
- Renforcement des mesures en faveur des combustibles fossiles par décret présidentiel.
- Absence d’une délégation américaine de rang élevé à COP30.
Plusieurs observateurs soulignent que cette lacune diplomatique profite à la Chine, déjà premier émetteur actuel de gaz à effet de serre, qui étend son influence via les technologies propres et les chaînes d’approvisionnement.
(Le président a présenté un décret visant à renforcer l’extraction et la production de charbon en avril 2025.)
Remplir le vide : la stratégie chinoise
Selon Francesco La Camera, directeur général de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables, « l’eau coule là où il y a du vide » : la diplomatie suit souvent cette logique. La position dominante de la Chine dans les renouvelables et les véhicules électriques renforce ainsi son poids dans les discussions climatiques.
Gavin Newsom, gouverneur de Californie, a mis en garde contre la montée en puissance chinoise dans les chaînes de valeur et la fabrication, estimant que les États‑Unis se trouvent dans une « position compétitive critique » s’ils ne répondent pas à ces avancées.
- La Chine a agrandi son pavillon à COP30, placé près de l’entrée, signe d’une présence renforcée.
- La délégation chinoise combine leadership technologique et discours diplomatique proactif.
Des dirigeants d’entreprises chinoises ont pris la parole lors du sommet. Meng Xiangfeng, vice‑président du fabricant de batteries CATL, a appelé à « honorer l’héritage de Paris » et à renforcer la coopération climatique pour bâtir « un monde propre et beau ».
CATL fournit aujourd’hui près d’un tiers des batteries destinées aux constructeurs de véhicules électriques, y compris certains acteurs américains et européens, et a organisé pour la première fois un événement officiel durant la conférence.
- Acteurs présents et mis en avant : CATL, State Grid, Trina, Longi, BYD.
- BYD a exposé une flotte de véhicules hybrides rechargeables produits dans son usine de Bahia (Brésil) pour une utilisation sur le site de COP30.
Impact industriel et investissement
La présence industrielle chinoise à COP30 illustre une stratégie d’exportation de technologies bas carbone. Des groupes d’envergure mondiale dans le solaire, les batteries et les réseaux électriques ont multiplié les démonstrations et les annonces.
Selon un rapport du laboratoire Zero Net de l’université Johns Hopkins, les investissements manufacturiers mondiaux dans les énergies renouvelables ont dépassé 225 milliards de dollars depuis 2011, soulignant l’ampleur de la transition industrielle.
(La délégation chinoise a constitué la plus grande présence de l’histoire des conférences climatiques annuelles de l’ONU.)
La Chine en coulisses : diplomatie et critiques
En marge des stands et des démonstrations technologiques, la Chine joue un rôle plus discret mais influent dans les négociations. Des diplomates estiment que Pékin comble progressivement le vide laissé par Washington en mobilisant financements et promesses techniques.
Un diplomate d’un pays en développement a déclaré que la Chine agit « progressivement comme garante du système climatique », ayant massivement investi dans l’économie verte et disposant d’intérêts à préserver ces avancées.
Des voix comme Sue Biniaz, ancienne adjointe au représentant spécial américain pour le climat et l’une des architectes de l’accord de Paris, reconnaissent la capacité de la Chine à rassembler les intérêts du Sud global, des grandes économies émergentes aux petits pays en développement.
Cependant, des critiques persistent. Certains observateurs estiment que Pékin n’a pas encore fixé d’objectifs d’atténuation suffisamment ambitieux hors de son positionnement industriel. En septembre, la Chine a annoncé une réduction des émissions de l’ordre de 7 à 10 % par rapport au pic d’ici 2035, un objectif jugé modéré par certains experts.
Li Shuo, observateur chevronné des négociations climatiques et directeur d’un centre de politique climatique, nuance ces critiques : pour lui, la force réelle tient moins aux discours publics qu’à la capacité à produire et investir dans les technologies bas carbone. « L’État le plus puissant n’est pas celui qui parle le plus fort au micro, mais celui qui produit et investit réellement », a‑t‑il affirmé.

