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Les microplastiques menacent désormais les abysses, alerte la communauté scientifique réunie à Nice en juin 2025, pointant une pollution marine qui atteint les écosystèmes profonds et met en péril la biodiversité des fonds marins.
À Nice (juin 2025), les microplastiques atteignent les abysses
La question des microplastiques et de la pollution marine a été au cœur des débats lors de la troisième conférence de l’ONU sur les océans (UNOC3), qui s’est tenue à Nice du 8 au 13 juin 2025. Elle faisait suite au One Ocean Science Congress, organisé du 3 au 7 juin 2025 et regroupant 2 500 scientifiques. Ces experts ont formulé des recommandations pressant les décideurs d’adopter une approche de précaution avant toute ouverture à grande échelle de l’exploitation des fonds marins.
Appel des scientifiques pour une pause et des études approfondies
Les participants du One Ocean Science Congress ont demandé aux diplomates et aux gouvernements d’attendre des études scientifiques plus complètes sur les effets potentiels de l’exploitation des grands fonds marins sur les écosystèmes abyssaux. Certains États, dont la France, plaident pour un moratoire ou une « pause de précaution » afin de ne pas engager d’interventions susceptibles d’altérer irréversiblement ces milieux encore peu connus.
Observations sur la présence de microplastiques
Pierre‑Marie Sarradin, responsable de l’unité mixte biologie et écologie des écosystèmes marins profonds (Ifremer et université de Bretagne‑Occidentale), rappelle que la vision des abysses comme déserts a évolué : « Il y a quelques années, on pensait encore que les abysses étaient désertiques, mais nous avons découvert des écosystèmes très particuliers, parfois complètement exubérants avec des organismes de grande taille ». Il souligne ensuite la contamination observée : « Cette image d’écosystème isolé et encore pristine a été récemment remise en question avec la découverte de microplastiques jusque dans les plus grandes fosses océaniques et de polluants éternels dans des organismes qui vivent à 6 000 mètres de profondeur, voire 7 000 ».
La découverte de microplastiques et de « polluants éternels » jusqu’aux zones les plus profondes montre que la pollution marine ne se limite pas aux littoraux ou aux colonnes d’eau superficielles, mais affecte aussi la faune et les processus écologiques des abysses.
Exploitation des minéraux : nodules cobaltifères et risques
Au‑delà de la pollution, l’exploitation des ressources minérales des grands fonds représente une autre menace. « Il y a des nodules ou des encroûtements cobaltifères qui contiennent des ressources pouvant pallier le manque potentiel de métaux terrestres », détaille Pierre‑Marie Sarradin. L’extraction de ces nodules pourrait provoquer la destruction directe d’habitats benthiques et générer d’importants panaches de sédiments, potentiellement chargés de substances toxiques perturbant les communautés abyssales.
Les scientifiques insistent sur l’absence actuelle de connaissances suffisantes pour évaluer précisément l’ampleur et la durée des impacts, et sur la nécessité d’études à long terme avant toute exploitation industrielle à grande échelle.
Données et suites institutionnelles après l’UNOC3
L’UNOC3 a rassemblé 64 chefs d’État et de gouvernement et quelque 12 000 délégués, signe de l’importance accordée à la gouvernance des océans. Le 8 juin 2025, jour d’ouverture de la conférence, a par ailleurs été publié le premier baromètre de l’état de santé des océans, nommé Starfish (« étoile de mer »), qui sera mis à jour annuellement. Les recommandations scientifiques issues du One Ocean Science Congress ont été transmises aux négociateurs présents à Nice afin d’éclairer les négociations sur la protection de la haute mer et la gestion des ressources des fonds marins.
Au terme des rencontres, la demande centrale demeure : appliquer le principe de précaution et poursuivre les recherches pour évaluer l’impact des activités humaines — y compris la pollution plastique et l’exploitation minière — sur la biodiversité abyssale et l’équilibre global des océans.