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Dans Un amour infini, Ghislaine Dunant, amour, rencontre, Corse, roman se déploie un récit de quelques jours qui suspend le cours des vies : à Tenerife, aux Canaries, une rencontre fortuite entre Louise et Nathan ouvre une parenthèse intime et transformatrice.
Ghislaine Dunant, amour, rencontre, Corse, roman : une parenthèse tinerféenne en juin 1964
Au bar d’un hôtel de Tenerife, un homme est assis ; une femme le rejoint. Ils ne se connaissent pas. Pierre, le mari de Louise et ancien élève de Nathan, avait pourtant organisé leur rencontre, mais un drame l’a contraint à quitter l’île précipitamment. Nathan est en mission pour étudier l’intérêt d’un observatoire astronomique américain sur l’île ; Louise, qui n’avait jamais voyagé hors de France ni été séparée de ses trois filles, vit pour quelques jours une liberté inédite.
La narration de Ghislaine Dunant déroule ces heures avec lenteur et précision : des pentes volcaniques du Teide aux ruelles de La Laguna, les deux personnages sillonnent l’île et se racontent. Leur échange n’a rien d’une aventure mondaine ; il s’agit d’un face‑à‑face où chacun mesure la fragilité et l’éphémère du moment partagé.
Une écriture centrée sur l’instant et l’âme
Dès leur première rencontre, Louise sait qu’elle veut préserver ces jours pour elle seule, renoncer à ses rôles d’épouse et de mère et se retrouver « juste elle‑même en tête à tête avec l’instant présent ». Le livre met en relief cette aspiration à l’instantanéité intérieure : « Nathan n’a pas besoin d’elle. Elle se rend compte que sentir cela l’attire vers lui. Il ne lui demande rien. Oui, sa vie, ici, lui appartient. »
Plutôt que de s’attarder sur la chair ou la passion physique, l’écriture privilégie le « dialogue d’âme à âme » : la blessure de l’exil pour Nathan, la liberté paradoxale des années de guerre pour Louise. Ces éléments constituent la matière de leur individualité et expliquent que leur rencontre n’aurait pu se produire autrement.
Thèmes, ton et portée
Le roman évite la caricature de l’adultère ; il explore plutôt l’inéluctabilité d’un lien qui ressemble à une force naturelle, inscrite « dans les roches sédimentaires du temps et de l’espace ». La sensualité affleure sans dominer : l’intérêt porte sur la transformation intime provoquée par le regard de l’autre et par la suspension du quotidien.
Le lecteur, selon le texte, ressort lui aussi « infléchi » : l’œuvre se lit et se relit, suscitant un émerveillement discret plus voisin d’un déplacement d’orbite que d’une rupture radicale. Cette image astronomique fait écho à la mission de Nathan et renforce la métaphore centrale du livre : deux astres dont l’attraction infléchit la trajectoire.
Éléments concrets et parution
Le récit se situe en juin 1964 et s’appuie sur des lieux identifiables de Tenerife, en particulier le Teide et La Laguna. L’autrice, Ghislaine Dunant, lauréate du Prix Fémina essai 2016 pour sa biographie de Charlotte Delbo, privilégie ici un style qui ralentit le temps et affine l’attention portée aux personnages.
« Un amour infini », de Ghislaine Dunant, est publié chez Albin Michel : 176 pages, 19,90 €. Parution en librairie le 20 août.