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Le transport maritime mondial se retrouve au cœur d’une tempête commerciale qui bouleverse les routes maritimes traditionnelles. Entre droits de douane, tensions géopolitiques et réorganisation des chaînes logistiques, le secteur fait face à d’importantes incertitudes et ajustements.
Des perturbations majeures alimentées par les tensions commerciales
Depuis mi-mars, les annonces se succèdent et impactent directement le transport maritime. Pékin bloque les livraisons de Boeing, Ford ralentit ses exportations automobiles vers la Chine, tandis que DHL suspend ses envois de grande valeur aux États-Unis. Ces mesures traduisent un climat commercial tendu, où la mondialisation vacille et les chaînes logistiques subissent de fortes pressions.
Après une stabilisation apparente suite à la flambée des prix du fret durant la pandémie de Covid-19, l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier a réintroduit une forte incertitude sur le marché. En mars, le fret mondial a connu un ralentissement avec des navires remplis à moitié seulement, les entreprises cherchant à stocker leurs marchandises entre l’Europe et la Chine en attendant une évolution politique.
L’impact direct des droits de douane américains sur le fret maritime
Le 2 avril, l’annonce de droits de douane américains a provoqué une onde de choc mondiale. Avant l’entrée en vigueur des hausses tarifaires de 10 % le 5 avril, puis des taxes ciblées le 9 avril, une ruée vers le fret s’est déclenchée. Les exportateurs ont accéléré l’expédition des marchandises, saturant les capacités de transport et faisant repartir les prix à la hausse.
Alexandre Charpentier, expert en transport au cabinet Roland Berger, explique ce phénomène : « Les gens veulent acheminer au maximum vers les États-Unis : ils déstockent ». Cette frénésie a été confirmée par Arthur Barillas De Thé, président d’Ovrsea, qui parle d’un effet « front loading » avec un préchargement massif dès les premiers mois de l’année. Par anticipation, certains clients ont évité une facture douanière élevée, notamment dans le secteur du luxe, où jusqu’à 10 millions d’euros ont été économisés au premier trimestre.
Depuis l’annonce d’une suspension temporaire des droits de douane pour 90 jours à partir du 9 avril, les expéditions de conteneurs continuent de s’ajuster dans un climat d’incertitude, annonçant une reprise chaotique et une recomposition des routes maritimes.
Réorganisation des routes maritimes face à l’escalade tarifaire
La suspension des droits de douane n’inclut pas encore la Chine, la cible principale des mesures américaines. Avec une augmentation de plus de 145 % des tarifs sur les produits chinois aux États-Unis et de 125 % sur les produits américains en Chine, l’axe maritime Chine/États-Unis est fortement touché. Les volumes transitant sur cette route historique chutent significativement.
Alexandre Charpentier souligne un ralentissement marqué du corridor transpacifique, qui fut longtemps l’un des plus dynamiques du fret maritime mondial. Cette baisse ouvre la voie à l’émergence de nouveaux axes commerciaux, notamment :
- La Chine intensifie ses échanges avec l’Afrique.
- L’Inde et l’Asie du Sud-Est gagnent en importance dans les nouvelles routes maritimes.
Les flux inter-asiatiques entre la Chine, l’Inde, le Vietnam, la Malaisie et les Philippines restent parmi les plus dynamiques du secteur. Toutefois, cette croissance est une tendance de long terme, difficile à attribuer directement aux tensions commerciales récentes. En revanche, une réorientation stratégique vers ces corridors est observée, avec des acteurs majeurs comme MSC qui adaptent leurs capacités aux nouvelles réalités logistiques.
Des dynamiques diverses selon les axes maritimes
Sur la route maritime Chine-Europe, l’impact des mesures américaines est quasi nul. Même si l’Europe impose des taxes sur certains petits colis chinois, le faible volume du fret aérien concerné ne suffit pas à bouleverser le trafic maritime entre ces deux continents.
En somme, le transport maritime mondial traverse une période d’instabilité, avec des routes commerciales en pleine recomposition dictée par les enjeux géopolitiques et économiques actuels.