Home ActualitéUne journée dans la vie d’un journal manuscrit au Bangladesh

Une journée dans la vie d’un journal manuscrit au Bangladesh

by Sara
Bangladesh

Dans un marché aux poissons animé du sud du Bangladesh, la journée ordinaire de Hasan Pruiz ne ressemble à aucune autre. Ouvrier journalier et éditeur en chef d’un journal manuscrit local nommé Andermanik, il partage son temps entre la vente de poisson et la rédaction des histoires de sa communauté.

Ce récit suit son rythme quotidien, la vie collective de son village côtier et la façon dont un journal manuscrit Bangladesh relie des habitants souvent oubliés des flux médiatiques nationaux.

Un marché de poissons animé

Le marché de Mahipur, dans le district de Patuakhali, se réveille avant l’aube. L’air est salin, les bateaux colorés s’amarrent, et le bruit des moteurs diesel accompagne le déchargement des captures.

Hasan, 44 ans, travaille debout parmi des barils et des caisses en plastique, triant et emballant des hilsa — le poisson national du Bangladesh — destiné aux villes comme Dacca et Barishal.

Il commence sa journée vers 4 heures du matin par la prière de l’aube et un thé noir. Sa rémunération quotidienne tourne autour de 600 takas (environ 5 dollars).

Hasan livre un journal à un villageois

« Mon village »

Après le marché, Hasan regagne sa maison de trois pièces, qui sert aussi de siège pour Andermanik — « la gemme du noir » en bengali, du nom du petit fleuve voisin.

Ne possédant pas d’ordinateur, lui et son équipe écrivent les articles à la main avant de les photographier pour impression. Ils estiment que l’écriture manuscrite donne un caractère intime et proche au journal.

Hasan a lancé l’initiative en 2016, encouragé par un journaliste environnemental de Dacca, puis publié le premier numéro le 1er mai 2019, en hommage aux travailleurs.

Vue de West Sonatala

Oubliés par le monde

La région est isolée : routes dégradées, réseau téléphonique intermittent et accès à l’électricité récent et limité. Les soins médicaux de base manquent, et la plupart des foyers n’ont pas de télévision.

Conséquences pour la communauté :

  • Accès réduit à l’information nationale et régionale.
  • Difficultés de déplacement en saison des pluies — habitants forcés de marcher pieds nus dans la boue.
  • Vulnérabilité accrue face aux catastrophes climatiques (inondations, intrusions d’eau salée).

Ce sentiment d’abandon a poussé Hasan à créer un média local pour raconter leurs propres histoires.

La communauté

L’équipe d’Andermanik a grandi de dix contributeurs au lancement à une équipe d’environ 17 correspondants bénévoles. Ils se réunissent une ou deux fois par cycle de publication pour partager idées et récits.

Les membres représentent divers profils locaux :

  • Enseignants et électriciens.
  • Ouvriers journaliers et conducteurs d’e-rickshaw.
  • Une couturière qui recueille des témoignages féminins, et un correspondant issu de la minorité hindoue.

Russiah Begum, membre de l'équipe

Les réunions se tiennent autour de la table de la maison de Hasan, souvent accompagnées d’un thé et d’un peu de riz soufflé offert par sa femme.

Un geste qui change tout

Les sujets traités dans le journal vont des dégâts causés par les cyclones aux histoires personnelles de familles déplacées par les inondations. Ces récits ont parfois suscité une aide extérieure concrète.

Exemples d’impacts :

  • Une femme sinistrée a reçu des dons totalisant 60 000 takas (environ 420 dollars) pour reconstruire une maison, après la diffusion de son histoire.
  • Une autre famille a obtenu des terres et un logement grâce à l’attention suscitée par un poème publié dans le journal.

Processus de production :

  • Contributions manuscrites envoyées à Hasan.
  • Rédaction finale à l’encre sur des feuilles A3.
  • Photocopie et assemblage en bulletins de quatre pages, 300 exemplaires par numéro.

Coût et distribution :

  • Coût d’impression par exemplaire : environ 10 takas (0,08 $).
  • Distribution principalement gratuite ou vendue au prix de revient selon les possibilités des habitants.

Hasan consulte des exemplaires

Un lecteur fidèle

Parmi les lecteurs, Azizur Rehman Khan, 84 ans, incarne la fidélité au journal. Il achète chaque numéro depuis deux ans et le fait livrer par Hasan.

Azizur explique que, lorsque le monde semble avoir oublié la région, Andermanik raconte leur vie et leur douleur. Pour lui, Hasan est « la gemme qui brille dans notre obscurité ».

Azizur Rehman, lecteur fidèle

Perspectives

Hasan souhaite officialiser Andermanik en l’enregistrant auprès des autorités régionales afin d’assurer une protection face aux pressions politiques éventuelles.

Parallèlement, il poursuit ses études supérieures et espère que sa qualification facilitera l’enregistrement du journal comme institution médiatique.

À travers ses pages manuscrites, Andermanik continue d’offrir à une communauté côtière un espace d’expression, de solidarité et d’espoir face aux défis climatiques et socio-économiques.

source:https://www.aljazeera.net/culture/2025/9/6/%d9%8a%d9%88%d9%85-%d9%81%d9%8a-%d8%ad%d9%8a%d8%a7%d8%a9-%d8%b5%d8%ad%d9%8a%d9%81%d8%a9-%d9%85%d9%83%d8%aa%d9%88%d8%a8%d8%a9-%d8%a8%d8%ae%d8%b7-%d8%a7%d9%84%d9%8a%d8%af-%d9%81%d9%8a

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