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L’addiction aux paris sportifs est un thème central du témoignage de Nicolas, 27 ans, qui raconte à franceinfo son combat contre une pratique devenue pathologique ; son récit soulève aussi la question des stratégies publicitaires des opérateurs, pointées par l’association Addictions France et les chiffres de l’Office français des drogues et toxicomanies (OFDT).
En France, l’addiction aux paris sportifs et les chiffres de l’OFDT : 350 000 joueurs quotidiens
Selon l’Office français des drogues et toxicomanies, les paris sportifs enregistrent 350 000 joueurs quotidiens. Au-delà de la Française des jeux et du PMU, seize opérateurs agréés proposent des paris sur Internet. L’association Addictions France, dans un rapport publié mardi 16 septembre, dénonce des stratégies publicitaires offensives de ces organismes qui « peuvent favoriser un jeu pathologique ».
Interrogé sur l’impact de la publicité, le témoignage de Nicolas illustre la façon dont la communication commerciale peut banaliser la pratique et masquer ses risques. « Si je peux éviter ça à n’importe qui », dit-il, il souhaite que son récit serve de prévention face à des messages récurrents vantant la facilité de gagner.
Le témoignage de Nicolas, 10 ans d’addiction et dettes jusqu’à 200 000 €
Nicolas raconte que son « cauchemar » a commencé à 15 ans : « J’ai découvert les paris sportifs en me disant, ‘chouette, il y a un moyen de se faire de l’argent !’ ». Rapidement, la pratique est devenue problématique : « Je préférais ne pas manger et aller parier mon argent ». Il ajoute : « Tout l’argent que j’obtenais il était pour parier, donc ma pratique est devenue problématique assez rapidement ».
Ses parents ont dû intervenir financièrement. « Mes parents ont été obligés de faire un crédit pour rembourser des dettes que j’avais déjà commencé à occasionner dès l’âge de 18 ans. » Les proches ont contracté un crédit de 10 000 € pour éponger ses premières dettes, et, « au plus haut de la dette, ça s’élevait à 200 000 € ». « Un moment donné, c’est trop dur et trop lourd à porter », confie-t-il.
« J’ai tenté de mettre fin à mes jours, j’ai fait une tentative de suicide et par miracle, j’ai survécu »
Pris dans une spirale d’isolement et de perte de contrôle, Nicolas dit avoir atteint un point de rupture : « J’ai tenté de mettre fin à mes jours, j’ai fait une tentative de suicide et par miracle, j’ai survécu ». Il interpelle ceux qui ne sont pas parieurs : « Ceux qui ne sont pas parieurs, je leur dirais que sur les paquets de cigarettes il y a écrit ‘fumer tue’. Moi, je peux vous garantir que parier aussi ».
Sur sa perception du jeu et de la publicité, il détaille : « J’ai longtemps été persuadé que si je ne gagnais pas et que je ne m’en sortais pas, c’est parce que je pariais mal. On nous fait tellement croire avec les publicités que c’est facile, que c’est à la portée de tout le monde et que de toute façon on ne peut pas aimer le sport sans parier que je me disais que je m’y prenais simplement mal, que je gérais mal mes émotions, mes mises, ma manière de faire. À chaque fois que j’y retournais je me disais ‘cette fois-ci ce sera différent, je parierai mieux’, sauf qu’en fait vous perdez de plus en plus d’argent, vous avez des dettes qui grossissent ».
Après des années de pratique, il a consulté un addictologue : « J’ai vu un addictologue et ça m’a globalement aidé », dit-il. Aujourd’hui, il affirme ne plus jouer et travailler « en quasi intégralité pour rembourser mes dettes ». Son propos vise avant tout la prévention : « Parier n’est pas sans conséquence. On est persuadé que c’est quelque chose de léger, d’accessible, or ce n’est pas le cas ».
Enquête associative et implications pour la prévention
Le rapport d’Addictions France met l’accent sur les techniques de marketing des opérateurs, accusées d’encourager une pratique répétée et parfois compulsive. Ces constats rejoignent le cas de Nicolas : l’exposition aux offres, les messages de promotion de gains rapides et l’accessibilité via Internet sont présentés comme des facteurs susceptibles d’aggraver des comportements à risque.
Les données de l’OFDT et le récit personnel montrent l’ampleur des conséquences sociales et sanitaires : dettes familiales, tentatives de suicide, emploi et santé mentale affectés. Les professionnels contactés pour le suivi des joueurs parlent d’un besoin accru de dispositifs de prévention, d’information et d’accompagnement médical adapté.
Nicolas espère que son témoignage contribuera à alerter et à dissuader des jeunes joueurs : « Si je peux éviter ça à n’importe qui », répète-t-il, en insistant sur la nécessité d’une prise de conscience collective concernant les risques liés aux paris sportifs.