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En 2024, plus d’un million de personnes âgées en Angleterre ont subi des temps d’attente de 12 heures ou plus aux urgences, une situation dénoncée par des médecins comme une menace alarmante pour la sécurité des patients les plus vulnérables.
Des attentes prolongées touchant principalement les seniors
Le Royal College of Emergency Medicine (RCEM) a publié un rapport révélant une augmentation marquée du nombre de patients âgés et fragiles confrontés à des délais d’attente prolongés, souvent sur des brancards dans les couloirs des services d’urgence. Les données obtenues par le RCEM via des demandes d’accès à l’information montrent que 1,15 million de personnes âgées de 60 ans et plus ont connu ces longues attentes dans les grands services d’urgence anglais en 2024. Ce chiffre représente une hausse significative par rapport aux 991 068 patients en 2023 et est presque trois fois supérieur aux 305 619 cas recensés en 2019.
Le rapport souligne également une corrélation préoccupante entre l’âge et la durée des attentes : les patients âgés de 60 à 69 ans ont une probabilité de 15 % d’attendre 12 heures ou plus, tandis que cette probabilité atteint 33 % chez les plus de 90 ans.
Des soins essentiels souvent négligés durant l’attente
Le RCEM a mené une enquête approfondie sur la qualité des soins dispensés aux personnes âgées dans les services d’urgence. L’étude du Quality Improvement Programme (QIP) a recueilli des données auprès de 149 services d’urgence, totalisant 24 865 patients. Chez les patients de plus de 75 ans, l’enquête révèle que les dépistages pour trois affections courantes sont fréquemment insuffisants :
- Seulement 16 % des patients ont été dépistés pour le délirium, un trouble réversible qui augmente le risque de mortalité et se manifeste par une altération soudaine des fonctions mentales.
- Moins de la moitié (48 %) ont été évalués concernant leur risque de chute.
- Un peu plus de la moitié (56 %) ont bénéficié d’un dépistage de la fragilité générale, ce qui permet une prise en charge adaptée en milieu hospitalier et à domicile.
Le rapport recommande notamment la mise en place d’un dépistage systématique de la fragilité dès l’entrée aux urgences, une mesure déjà adoptée en Écosse.
Alertes des experts médicaux sur la dégradation des soins
Dr Adrian Boyle, président du RCEM, dénonce un système de santé qui « échoue nos patients les plus vulnérables – plus d’un million l’an dernier ». Selon lui, ces patients, souvent nos parents et grands-parents, subissent un traitement dégradant et déshumanisant dans les couloirs des urgences.
Il souligne que ces longues attentes sont dangereuses, en particulier pour les personnes âgées, et mettent leur vie en danger. « Des améliorations sont nécessaires pour que les examens vitaux débutent dès leur arrivée, afin d’adapter les soins et de réduire le risque de retour aux urgences », insiste-t-il.
Le Dr Boyle regrette que, malgré les efforts des cliniciens en médecine d’urgence, « c’est le système qui pose problème et continuera d’affecter de manière disproportionnée les personnes âgées, sauf si les gouvernements du Royaume-Uni font des urgences une priorité politique ».
Perspectives et recommandations pour améliorer la prise en charge
Dr Anu Mitra, responsable du projet QIP sur la prise en charge des personnes âgées, rappelle que ces patients représentent une grande part des passages aux urgences, avec des besoins de soins complexes.
Face à la saturation grandissante et aux longs temps d’attente, elle insiste sur la nécessité pour les équipes d’urgence de maintenir les soins de base et le confort des personnes âgées. Elle se montre toutefois encouragée par les progrès déjà observés dans les évaluations réalisées.
Enfin, Dr Nick Murch, président de la Society for Acute Medicine, qualifie la situation de « très préoccupante » avec plus d’un million de seniors en attente prolongée, souvent dans des conditions indignes comme les couloirs. Il déplore que ces délais signalent un échec majeur du système de santé et appelle à faire des attentes de plus de 12 heures une exception rare.
Réponse officielle du gouvernement
Un porte-parole du ministère de la Santé et des Affaires sociales a déclaré qu’il est inacceptable que les personnes âgées attendent 12 heures ou plus aux urgences. Le gouvernement britannique investit l’équivalent de 29 milliards d’euros sur les deux prochaines années dans le NHS et les soins sociaux, a mis fin aux grèves des médecins résidents et s’engage à réduire les délais d’attente aux urgences pour que les patients soient pris en charge plus rapidement.
Le plan de santé décennal prévoit ainsi que les patients, y compris les plus âgés, soient vus rapidement aux urgences, que les délais continuent de diminuer et que davantage de rendez-vous puissent être obtenus chez le médecin généraliste.