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Gazéens échangent des médicaments perdus en temps de guerre
À Gaza, le pharmacien Anas Abu Karsh ne cesse de vérifier son application WhatsApp, où il gère un groupe dédié à la fourniture de médicaments perdus. Ce groupe reçoit des centaines de demandes de citoyens cherchant des médicaments en rupture de stock, et Anas se charge de les acheter grâce à ses vastes relations avec d’autres pharmaciens et des entrepôts de médicaments.
Il explique que l’idée de ce groupe, nommé « Médicaments Gaza », est née d’un besoin urgent pour le traitement. « Grâce à mon expérience personnelle et mes relations, j’ai trouvé un accueil large et positif », déclare-t-il.
Bien que son travail ait une dimension commerciale, Anas se considère comme engagé dans une « mission humanitaire ». Il regrette de ne pas pouvoir fournir tous les médicaments nécessaires, affirmant qu’il y a un manque sévère, voire une pénurie totale de nombreuses molécules. Plusieurs groupes médicaux spécialisés cherchent également des médicaments, en plus de ceux gérés par Abu Karsh.
Une souffrance croissante pour trouver des médicaments
Anas réussit chaque jour à acheter environ 300 médicaments pour les citoyens via son groupe électronique. Cependant, il fait face à des échecs concernant la mesure où de nombreuses catégories de médicaments font défaut, en raison d’une « demande effrayante et d’une offre limitée ».
Il partage l’exemple d’un citoyen cherchant un médicament pour traiter les problèmes de thyroïde de sa fille, exprimant sa volonté de payer « n’importe quel montant » pour l’obtenir. De nombreux patients souffrant de calculs rénaux et de vessie l’appellent également, mais il ne peut pas les aider, même pour des analgésiques.
Les parents d’enfants malades sont également confrontés à une impasse en recherchant des « laits médicaux », nécessaires pour éviter que leurs enfants ne souffrent de conséquences graves, souligne-t-il, ajoutant qu’un de ses proches souffre d’un agrandissement de la prostate et ne peut pas aller aux toilettes faute de médicaments.
Les défis de la guerre sur l’accès aux soins
Anas révèle également qu’aucune pommade, notamment les antibiotiques, n’est disponible, malgré l’augmentation des maladies cutanées, surtout dans les centres d’hébergement. Il s’excuse également auprès de ceux qui lui envoient des messages à ce sujet.
Les victimes des agressions israéliennes font face à une « double tragédie », selon Anas, qui ne peut leur fournir les antibiotiques nécessaires pour traiter leurs blessures ni même des analgésiques tels que le paracétamol ou l’ibuprofène, dont la demande a considérablement augmenté avec le renforcement du blocus.
Par ailleurs, Anas ne cache pas ses préoccupations concernant la mauvaise conservation des médicaments, pouvant compromettre leur efficacité thérapeutique, comme pour l’insuline et les ampoules de seringue nécessitant un réfrigérateur pour maintenir leur qualité.
Un recours en ligne pour les médicaments
Bassel Abdel Bari a eu du mal à trouver des médicaments pour son père, souffrant de maladies cardiaques nécessitant huit traitements. Désespéré, il a publié des demandes sur des groupes médicaux en ligne, affirmant que la recherche sur Internet est utile, bien qu’elle soit souvent à un prix élevé.
De même, Hiba Jawda explique qu’elle cherche des médicaments non seulement pour elle et ses enfants, mais aussi pour aider ceux qui lui demandent, en raison de son parcours médical en pharmacie et nutrition. Elle souligne la pénurie d’antibiotiques et de traitements contre le cancer parmi les plus recherchés.
Le Dr Ahmad Al-Nabris, médecin interniste à l’hôpital Nasser de Khan Younis, utilise également Internet pour se procurer des médicaments perdus pour ses patients. Bien qu’il trouve certaines solutions, il note que cette méthode ne peut pas remplacer le besoin énorme de médicaments disponibles.
Un manque alarmant de médicaments
Le Dr Kifah Touman, responsable des entrepôts de médicaments au ministère de la Santé, déclare que les médicaments dans la région peuvent être classés en deux catégories : les médicaments commerciaux et ceux destinés aux hôpitaux par l’aide internationale. Le premier type est désormais presque épuisé en raison du manque d’importation, tandis que le second a cessé depuis mai dernier suite à l’occupation de Rafah.
Il révèle que la carence en médicaments au sein du ministère atteint 60 %, et que les consommables médicaux manquent à 80 %. Ce déficit menace les services de santé, risquant d’interrompre des soins vitaux tels que la dialyse rénale et les traitements contre le cancer.
Le Dr Touman insiste également sur l’impact de cette pénurie sur la santé des femmes et des enfants, les maladies chroniques, les vaccinations et la lutte contre les épidémies.