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La situation de l’anguille européenne est alarmante. En 2008, l’Union internationale pour la conservation de la nature a classé cette espèce comme « en danger critique d’extinction ». Malheureusement, depuis lors, la situation ne s’est pas améliorée et s’est même détériorée rapidement, selon une étude réalisée par une équipe scientifique espagnole.
Une espèce en déclin
L’anguille commune, ou anguille européenne (Anguilla anguilla), est un poisson élancé, sans épines dans ses nageoires, mesurant environ entre un mètre et un mètre et demi. Son corps est de couleur grisâtre. Cet animal mystérieux a longtemps fasciné l’humanité, Aristote croyant même qu’elles naissaient des entrailles de la Terre. Autrefois, leur chair était très prisée, conservée par salaison ou fumage. Aujourd’hui, elles souffrent d’une mauvaise image, à l’inverse des angulas, leurs alevins, qui sont très coûteux, tandis que les anguilles sont considérées comme un poisson bon marché.
Anguiles du Delta de l’Ebre, un patrimoine culinaire
La pêche dans les lagunes du Delta de l’Ebre remonte au XIIIe siècle, jouant un rôle clé dans l’établissement de la population locale. La confrérie de Sant Pere détient les droits de pêche depuis 1879 et tient un registre des captures depuis 1966. Ils pêchent l’anguille jaune, appelée « borda », et l’anguille argentée, connue sous le nom de « vera », qui est prête à retourner vers le Sargasso.
La migration fascinante de l’anguille
Le retour des anguilles vers le Sargasso est l’une des migrations les plus étonnantes de la nature. Les anguilles arrivent sous forme d’angulas sur les côtes européennes et nord-africaines environ deux ans après leur naissance, à des milliers de kilomètres de là.
Autrefois, les anguilles étaient abondantes dans les mers d’Europe et au nord de l’Atlantique. Elles nourrissaient de nombreuses communautés côtières et intérieures, soutenant des pêcheries qui sont devenues industrielles au XXe siècle.
Un effondrement brutal
Le déclin de l’anguille a commencé dans les années 1980, avec une réduction de près de 95 % des arrivées d’angulas. Dans le Delta de l’Ebre, les captures d’anguilles ont chuté de 77 % entre 1970 et 1990. Depuis cet effondrement, la population d’anguilles européennes n’a pas repris, et une étude récente de l’Estación Biológica de Doñana et du Parc Naturel du Delta de l’Ebre révèle une situation « très préoccupante ».
Des recherches alarmantes
Les chercheurs ont examiné les données de captures d’anguilles dans trois des principales lagunes du Delta et ont constaté un déclin spectaculaire de l’espèce au cours des dernières années, similaire à celui des années 1980. Entre 2015 et 2017, la population d’anguilles a diminué de plus de 80 %, et le chercheur Miguel Clavero a noté que ce déclin concerne une espèce déjà en danger critique d’extinction.
Arrêter la pêche pour sauver l’anguille
Il est légitime de se demander pourquoi les efforts de conservation de l’anguille n’ont pas progressé malgré les alertes passées. Les scientifiques reconnaissent que les causes de ce déclin demeurent floues. Une hypothèse évoquée est l’impact de la jaiba bleue, un crabe envahissant qui pourrait nuire aux populations d’anguilles et d’autres espèces aquatiques.
Le groupe d’experts en anguille de l’ICES a longtemps recommandé de réduire les captures à « aussi près de zéro que possible ». Au cours des trois dernières années, des appels ont été lancés pour fermer la pêche aux anguilles. Cependant, la plupart des États membres de l’UE ont ignoré ces recommandations.
Pour préserver l’espèce, il est impératif de cesser immédiatement la pêche et le commerce des anguilles, conclut Clavero. Les auteurs de l’étude proposent de stopper l’exploitation de l’anguille tout en impliquant le secteur dans le suivi de l’espèce, avec un système de soutien approprié.