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Alors que le monde détourne le regard, la situation des droits humains à Kaboul sombre dans une crise sans précédent. Les violences contre les femmes en Afghanistan ne se limitent plus aux agressions physiques ; elles s’incarnent désormais dans un apartheid de genre institutionnalisé, qualifié d’échec collectif par les observateurs internationaux.
Des sanctions inédites face à l’inertie globale
Dans un contexte géopolitique marqué par l’indifférence, l’Australie a récemment pris une initiative solitaire mais significative. Canberra a mis en place un cadre de sanctions sans précédent ciblant directement les hauts responsables talibans, dont le « juge en chef » Abdul Hakim Haqqani. Ce nom, synonyme de torture et d’exécutions sommaires, figure désormais sur la liste noire australienne, une mesure qui va bien au-delà des restrictions de visa habituelles.
Si la Cour Pénale Internationale (CPI) a déjà émis un mandat d’arrêt à son encontre, peu de nations ont osé instaurer des sanctions autonomes aussi strictes. Cette décision tranche avec la passivité d’une grande partie de la communauté internationale, souvent accusée de normaliser tacitement le régime en place.
Une violence systémique et structurelle
Le Dr Sima Samar, ancienne vice-présidente de l’administration intérimaire afghane et figure de proue de la défense des droits humains, dénonce une vision réductrice de la brutalité talibane. Selon elle, il est urgent de redéfinir la perception des violences femmes Afghanistan. Il ne s’agit pas uniquement d’agressions sexuelles ou physiques, pour lesquelles aucune donnée fiable n’existe depuis la fermeture des refuges, mais d’une violence structurelle totale.
« La violence, ce n’est pas seulement le viol », martèle Sima Samar. « Lorsqu’ils interdisent aux femmes et aux filles d’apprendre, c’est de la violence. Lorsqu’ils leur interdisent de travailler et d’avoir une vie publique, c’est de la violence. Lorsqu’ils réduisent les femmes au silence, c’est de la violence. »
Les quelque 100 décrets émis par les Talibans ne sont pas, selon elle, le fruit de la religion ou de la culture, mais une pure dynamique de pouvoir visant à effacer la moitié de la population de l’espace public.
L’émergence d’un esclavage moderne
L’aspect le plus alarmant de cette régression est la recrudescence des mariages forcés, exacerbée par l’effondrement économique. Si le mariage des enfants a toujours été une problématique culturelle complexe, la situation actuelle s’apparente, selon les experts, à une nouvelle forme d’esclavage moderne.
Alors que l’âge légal du mariage était fixé à 16 ans avant le retour des Talibans, des fillettes pré-pubères, parfois âgées de seulement 12 ans, sont aujourd’hui « sacrifiées » par leurs familles pour survivre. « Ce n’est pas un mariage, c’est de l’esclavage », insiste le Dr Samar. « Lorsqu’une enfant de 12 ans est mariée sans aucun contrôle sur sa vie, elle devient un simple outil. »
Cette détresse se traduit par une augmentation dramatique des taux de suicide et de dépression parmi les femmes et les jeunes filles, face à un horizon politique mondial qui semble tétanisé.
La complicité du silence international
Malgré l’horreur de la situation, la réponse internationale reste fragmentée. Trente-neuf États membres de l’ONU offrent une légitimité de facto aux Talibans en leur permettant de contrôler des ambassades. D’autres puissances, comme la Chine ou la Russie, ont rompu les rangs pour traiter directement avec le régime, acceptant les Talibans comme dirigeants légitimes.
Toutefois, une lueur d’espoir subsiste sur le plan juridique. L’Australie a rejoint le Canada, l’Allemagne et les Pays-Bas pour porter l’affaire devant la Cour Internationale de Justice (CIJ), accusant le régime de violations flagrantes des droits des femmes. Si cette démarche reste incertaine, elle marque un refus de l’impunité totale.
Pendant ce temps, le régime taliban consolide son emprise sur la jeunesse. Avec 63 % de la population âgée de moins de 25 ans, l’endoctrinement des garçons dans les madrasas s’accélère, forgeant une génération élevée dans la haine des femmes et de l’Occident, préparant le terrain pour de futurs cycles de violence.