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En 2006, la cour d’appel de Pau a déclaré l’établissement Notre-Dame de Bétharram civilement responsable des viols et agressions sexuelles perpétrés par le père Silviet-Carricart. Cette décision judiciaire, peu médiatisée à l’époque, éclaire une affaire qui avait profondément secoué le Béarn.
Une condamnation civile majeure
L’arrêt rendu le 25 septembre 2006 par la chambre civile de la cour d’appel de Pau marque un tournant dans l’affaire Carricart. L’institution Notre-Dame de Bétharram est reconnue responsable des actes commis par son ancien père directeur, mis en examen dès 1998 pour le viol d’un élève. Malgré le suicide du prêtre en 2000 à Rome, qui avait éteint les poursuites pénales, la famille de la première victime avait engagé une procédure civile soutenue par l’avocat bordelais Me Gérard Boulanger. Cette action a abouti à la condamnation de l’établissement, soulignant sa responsabilité dans ces crimes.
Les faits et témoignages accablants
En 1998, un ancien élève avait dénoncé publiquement le père Carricart, accusé de l’avoir violé en 1988, le jour même des obsèques de son père. Le prêtre l’aurait attiré dans une salle de bains réservée aux adultes pour commettre l’agression. Placé brièvement en détention provisoire, il fut libéré sous contrôle judiciaire avant de se suicider.
La cour d’appel souligne que, bien que le père Carricart ait nié les viols, il avait admis avoir aidé un enfant à se laver dans cette salle de bains pour adultes, sans pouvoir justifier ce choix au lieu d’utiliser celle réservée aux enfants. Par ailleurs, le plaignant avait déjà signalé à des adultes des gestes inappropriés du religieux, notamment des mains posées sur son ventre, sans en comprendre la raison.
Les magistrats se sont également appuyés sur le témoignage d’un second élève, qui avait lui aussi dénoncé des agressions sexuelles similaires. Il a expliqué que le père Carricart « avait jeté son dévolu » sur eux à un moment où ils étaient particulièrement vulnérables, suite à la perte récente de leurs pères. Ce second témoignage a conforté la crédibilité du premier plaignant, dissipant les soupçons de fabrication.
La responsabilité de l’institution et l’absence de réaction
Grâce à l’examen approfondi du dossier d’information judiciaire, la cour conclut sans équivoque à la responsabilité du père Carricart dans les faits reprochés. Toutefois, elle met également en lumière la défaillance de l’établissement Notre-Dame de Bétharram, accusé d’avoir laissé s’installer un climat malsain et de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour protéger ses élèves.
Malgré cette décision judiciaire datant de 2006, aucune réaction significative n’a suivi. Le nouvel avocat du plaignant, Me Daniel Del Risco, déplore que cette vérité judiciaire soit restée longtemps dans l’ombre. Ce n’est qu’en 2024 que son client a été contacté par la Commission de reconnaissance et de réparation (CRR), créée par l’Église pour indemniser les victimes de violences sexuelles.
Un retentissement local et des controverses
L’affaire Carricart avait profondément bouleversé le Béarn. François Bayrou, dont les enfants fréquentaient l’établissement, s’était même rendu au domicile du juge Mirande pour discuter du dossier. Pourtant, la culpabilité du père Carricart a longtemps été mise en doute, certains refusant de croire aux accusations portées contre ce religieux très respecté.
Son enterrement avait réuni une partie de la haute société béarnaise, notamment l’épouse de François Bayrou, venue lui rendre un dernier hommage. L’institution Bétharram, quant à elle, n’a jamais communiqué publiquement sur cette condamnation civile, dont les attendus contredisent largement la version officielle défendue à l’époque.