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La Cour des comptes et la Sécurité sociale : enjeux critiques

by Sara
La Cour des comptes et la Sécurité sociale : enjeux critiques
France

La Cour des comptes est souvent perçue comme une institution austère, justifiant des réformes susceptibles d’affecter le service public. Elle a même été qualifiée de « cerbère de l’austérité ». En effet, une lecture attentive de ses rapports révèle un certain biais, notamment lorsque les débats publics s’appuient sur ces documents : seuls les arguments en faveur d’une réduction du service public semblent faire surface, tandis que d’autres aspects sont ignorés.

Une analyse critique du rapport sur la Sécurité sociale

Le rapport de la Cour de comptes sur la Sécurité sociale, publié en mai 2025, ne fait pas exception à cette tendance. Bien qu’il critique la Sécurité sociale et plaide pour une restriction de ses missions, il présente également un bilan sévère des politiques mises en œuvre ces dernières années. Or, ce bilan est largement absent des discussions publiques, où l’accent est mis sur le « trou de la Sécu », exhortant chacun à « faire des efforts », ce qui se traduit souvent par une réduction des droits.

Un allègement coûteux des cotisations sociales

Le chapitre III du rapport examine les allègements généraux de cotisations sociales, mettant en lumière leur coût élevé. Ces mesures entraînent non seulement une baisse des recettes pour la Sécurité sociale, mais montrent également une efficacité discutable en matière de création d’emplois. Le rapport souligne que depuis 1993, la réduction des cotisations sociales a été mise en avant pour favoriser l’emploi, sans succès probant.

Le titre de la première section évoque un allègement du coût du travail « insuffisamment piloté et évalué ».

Les évaluations récentes demeurent incertaines en raison des réformes successives, de la crise sanitaire et de l’inflation. De plus, la sensibilité de l’emploi au coût du travail a diminué, rendant difficile l’attribution de la baisse du chômage aux réductions de cotisations.

Une stratégie dépassée

Il semble, d’après la Cour elle-même, que cette stratégie ait atteint ses limites. Les allègements de cotisations représentent désormais 39 % du total de la politique de l’emploi, soit 179 milliards d’euros en 2022. Entre 2014 et 2024, le montant des allègements a quasi quadruplé, passant de 20,9 milliards d’euros à 77,3 milliards d’euros, alors que leur efficacité est remise en question.

Comment justifier qu’une politique publique de moins en moins efficace soit de plus en plus généralisée ?

Les allègements sont accordés sans conditions ni contreparties pour les employeurs, ce qui pose la question de leur pertinence. Même la majorité présidentielle a dû revoir sa position, proposant des mesures comme la révision des plafonds d’éligibilité aux baisses de cotisation.

Des pertes croissantes pour la Sécurité sociale

La deuxième section du rapport traite des pertes de recettes pour la Sécurité sociale. Selon la loi du 25 juillet 1994, les exonérations de cotisations sociales devraient être compensées par l’État. Cependant, cette compensation devient de plus en plus insuffisante, entraînant une augmentation de la dette sociale.

La transformation du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en allègements de cotisations en 2019 a contribué à la baisse des recettes, avec des pertes estimées à 5,5 milliards d’euros en 2024, et un endettement supplémentaire de 18 milliards d’euros depuis 2019.

Le rapport suggère clairement qu’il faut « atténuer l’ampleur des allègements de cotisations tout en limitant les conséquences sur l’emploi ».

La Cour propose également d’élargir l’assiette de calcul des cotisations en y intégrant les compléments de salaire.

Un débat public à réorienter

Que retenir de ce chapitre III ? Il pourrait être souhaité une critique plus approfondie des effets des allègements de cotisations sur l’emploi, mais il est clair que ce rapport permet d’orienter autrement le débat public. Bien qu’il puisse être tentant de se concentrer sur les déficits de la Sécurité sociale, il est crucial de reconnaître que la perte de recettes générée par une politique de l’emploi peu efficace constitue une part significative du problème.

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