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Ethiopie : Suppression du statut légal du Front de Libération du Tigré

by Sara
Ethiopie : Suppression du statut légal du Front de Libération du Tigré
Éthiopie

La Commission nationale électorale éthiopienne a pris une décision majeure en annulant la reconnaissance juridique du Front de Libération du Tigré (FLT) en tant que parti politique. Cette démarche soulève des questions cruciales sur l’avenir de l’accord de paix de Pretoria et ravive le débat sur la position politique et légale du Front dans le paysage éthiopien.

Que signifie cette décision ?

Le 14 mai, la Commission nationale électorale éthiopienne a supprimé le statut légal du Front de Libération du Tigré. Cette mesure s’appuie sur la loi électorale éthiopienne n° 1162/2019, qui régit l’enregistrement et la révocation des partis politiques.

La perte du statut légal signifie que le FLT n’est plus reconnu officiellement comme une entité politique légitime. Il perd ainsi tous ses droits politiques, organisationnels et financiers. Par conséquent :

  • Il est interdit de participer aux élections.
  • Il ne peut plus organiser d’activités politiques.
  • Ses actifs et propriétés sont gelés.
  • Il ne peut pas être automatiquement ré-enregistré.

Comment en est-on arrivé là ?

Le statut légal du Front a connu plusieurs revirements :

  • Le 18 janvier 2021, le FLT avait déjà perdu son statut légal à cause de sa participation à ce que le gouvernement qualifie de « rébellion armée ».
  • En mai 2021, le gouvernement éthiopien a classé le Front comme organisation terroriste, décision approuvée par le Parlement.
  • En novembre 2022, l’accord de paix de Pretoria incluait le retrait du FLT de la liste des organisations terroristes, validé en mars 2023 par le Parlement.
  • En août 2024, la Commission électorale avait accepté d’enregistrer le FLT comme nouveau parti politique sous conditions strictes, dont la tenue d’un congrès dans les six mois, proposition écartée par la direction du Front.
  • En février 2025, l’activité politique du FLT a été suspendue pour trois mois, décision jugée sans effet légal par le Front.
  • En mai 2025, la suppression officielle du statut légal a été prononcée en raison du non-respect des conditions d’enregistrement.

Arguments des parties impliquées

Le différend entre le Front et les autorités fédérales repose sur l’interprétation divergente de l’accord de Pretoria et la primauté des lois nationales :

  • Front de Libération du Tigré :
    • Le FLT considère que l’accord de Pretoria constitue un cadre légal contraignant qui rétablit automatiquement son statut de parti politique sans conditions supplémentaires.
    • Selon lui, l’accord annule la décision de la Commission électorale de janvier 2021 et exige la suppression de son étiquetage de groupe terroriste.
    • Il rejette les conditions imposées par la Commission en 2024, affirmant que cela contredit l’esprit de l’accord qui le désigne comme représentant légitime du Tigré.
  • Autorités fédérales :
    • Ces dernières insistent sur le fait que l’accord de Pretoria ne supprime pas l’application des lois nationales éthiopiennes.
    • La Commission électorale exige que le FLT respecte les procédures pour les partis ayant un passé armé, notamment l’organisation d’un congrès en six mois.
    • La suppression du statut légal s’appuie sur l’article 99 de la loi 1162/2019, interdisant les partis ne respectant pas les exigences, avec confiscation d’actifs et interdiction d’activités.

Moteurs politiques du différend juridique

Au-delà des arguments juridiques, ce conflit reflète une lutte politique profonde concernant le rôle du FLT au sein d’un État caractérisé par une grande diversité ethnique :

  • La direction du Front perçoit la légitimité politique comme clé pour retrouver sa place historique dans la politique éthiopienne.
  • Elle vise à défendre l’autonomie régionale du peuple tigré au sein du système fédéral éthiopien.
  • Le refus de l’enregistrement comme parti « nouveau » vise à ne pas perdre la légitimité acquise par la lutte précédente et à conserver un poids dans les négociations.
  • Certaines figures politiques tigréennes accusent le Front d’instrumentaliser l’accord de Pretoria à des fins politiques, notamment la reconquête du pouvoir régional.
  • Du côté gouvernemental, certains analystes estiment que la fédération cherche à affaiblir le Front et à réorganiser le pouvoir central.
  • Des divisions internes au sein du FLT, exacerbées notamment par la pression des conditions électorales, ont mené à une scission et la création d’un parti concurrent en 2025.

Conséquences attendues de cette décision

Cette mesure risque d’alimenter la fragilité de la paix fragile dans le Tigré et au-delà :

  • Le FLT peut contester cette décision devant la Cour fédérale suprême dans les 30 jours, ouvrant une possible voie de recours.
  • Le non-reconnaissance juridique fragilise l’accord de paix de Pretoria, mettant en péril son application et la stabilité régionale.
  • Des tensions sécuritaires pourraient ressurgir dans le Tigré, aggravant la crise humanitaire et paralysant les services essentiels tels que la santé et l’éducation.
  • Les retombées pourraient s’étendre à la région, notamment avec le risque d’une implication accrue d’acteurs externes comme l’Érythrée.
  • La situation souligne la vulnérabilité du processus de paix, un test majeur pour l’engagement de l’Éthiopie en faveur d’une paix durable.
  • Enfin, la transformation juridique du FLT pourrait remettre en question la validité même de l’accord initial, l’absence d’un désaccord légalement reconnu risquant de paralyser la dynamique politique.
source:https://www.aljazeera.net/politics/2025/5/20/5-%d8%a3%d8%b3%d8%a6%d9%84%d8%a9-%d8%aa%d9%88%d8%b6%d8%ad-%d8%a3%d8%a8%d8%b9%d8%a7%d8%af-%d9%86%d8%b2%d8%b9-%d8%a7%d9%84%d9%82%d8%a7%d9%86%d9%88%d9%86%d9%8a%d8%a9-%d8%b9%d9%86

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