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Les eurodéputés ont validé jeudi une modification majeure du statut de protection du loup en Europe. Désormais, cet animal sera considéré comme une espèce « protégée » au sein de l’Union européenne, et non plus comme « strictement protégée ». Cette décision, qui marque un tournant dans la conservation du loup, suscite vives critiques de la part des défenseurs de la biodiversité.
Une modification issue de la Convention de Berne
Ce changement législatif transpose dans le droit européen les récentes évolutions de la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage. Le texte a été adopté en session plénière à Strasbourg, avec le soutien de la majorité réunissant la droite (PPE), les socialistes et démocrates (groupe S&D) ainsi que les libéraux centristes de Renew.
À l’inverse, les Verts et le groupe de La Gauche ont exprimé leur opposition, dénonçant une décision motivée davantage par des considérations politiques que scientifiques. Selon Sebastian Everding, élu allemand représentant La Gauche, cette dégradation de la protection ignore des outils efficaces de coexistence et transforme la sauvegarde de la nature en un enjeu politique alimentant la peur plutôt que les faits.
De son côté, l’organisation WWF avait déjà critiqué cette mesure à l’automne 2024, soulignant que l’Union européenne abandonnait ainsi le loup à un sort incertain.
Quelles conséquences pour la protection du loup en Europe ?
Concrètement, ce déclassement facilite les tirs et abattages de loups dans les zones rurales et montagneuses où la proximité de l’animal avec le bétail et les chiens de troupeau est perçue comme une menace. Les États membres conservent la responsabilité des plans de gestion du loup, mais bénéficient désormais d’une plus grande flexibilité dans leur mise en œuvre, ce qui, selon Herbert Dorfmann, eurodéputé italien du PPE, pourrait favoriser la coexistence entre humains et loups.
Le Parti populaire européen (PPE), premier groupe du Parlement européen et famille politique de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, est à l’origine de cette initiative. Ce texte est le fruit de trois années de travail, motivé par la hausse des conflits entre éleveurs et loups.
Une population de loups en forte augmentation
Depuis la directive européenne de 1992 interdisant leur élimination, la population de loups a fortement progressé en Europe. En 2023, on dénombrait environ 20 300 individus sur le territoire de l’Union.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a elle-même alerté sur le « réel danger » que constituent les meutes de loups pour le bétail dans certaines régions. En septembre 2022, un loup avait pénétré dans la propriété familiale au nord de l’Allemagne, causant la mort d’un vieux poney.
Si aucun accident humain n’a encore été recensé, les inquiétudes des éleveurs restent vives. Selon les élus du PPE, plus de 60 000 animaux d’élevage sont attaqués chaque année dans l’UE, un chiffre souligné par l’Espagnole Esther Herranz Garcia, négociatrice du texte pour son groupe.
Des réactions politiques contrastées
Une partie de l’extrême droite semble prête à soutenir cette mesure, estimant que les agriculteurs ne peuvent plus travailler dans des conditions où ils se sentent menacés. Valérie Deloge, députée française du groupe Les Patriotes, affirme représenter à la fois les éleveurs et les citoyens confrontés à ce qu’elle qualifie de « menace permanente ».
Face à cette controverse, les socialistes et les centristes ont tenté de relativiser l’impact de ce changement. Pascal Canfin, eurodéputé français du groupe Renew et ancien ministre, a insisté sur le fait que le texte ne donne pas un « permis de tuer », mais simplement une latitude accrue pour des dérogations locales. Selon lui, le loup demeure une espèce protégée au niveau européen.