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En cette période de Noël, des centaines de milliers de personnes en Allemagne prennent le train pour retrouver leurs proches et célébrer les fêtes ensemble. Ce voyage en train est souvent associé à l’anticipation, à la nostalgie et parfois à quelques désagréments.
La préparation du voyage
Tout est prêt. Les préparatifs sont finalisés : chauffage baissé, modem débranché, déchets évacués et plantes arrosées. C’est jeudi matin, la dernière semaine avant Noël, et dans une quinzaine de minutes, mon train part pour un petit village en Basse-Saxe. À mon retour dans mon appartement à Zurich, la nouvelle année sera déjà entamée depuis quelques jours.
Alors que d’autres restent chez eux pour Noël, remplissant leur appartement de sapins, de cadeaux, de pains d’épices et de plats de fête, je monte dans le train. Mes collègues de Zurich, quant à eux, rentrent aussi chez eux : à Berne, Genève ou dans le Valais. Pour eux, ce sont des trajets courts, beaucoup de Suisses rentrent souvent de manière spontanée. Pour moi, le retour à la maison revêt une signification différente.
Une tradition allemande
En Allemagne, les distances sont grandes et les voyages longs. Les retrouvailles familiales sont plus rares lorsque l’on vit loin, mais elles sont d’autant plus précieuses. Pour beaucoup de Germaniques, prendre le train à Noël est une sorte de romantisme de fin d’année, rempli d’anticipation, de mélancolie et d’histoires à raconter.
Depuis que j’ai quitté la maison à vingt ans, je prends le train chaque Noël. Rarement, j’ai passé les fêtes à Berlin, où j’ai longtemps vécu. Même dans la capitale, l’importance du retour chez soi est palpable : le Prenzlauer Berg, un quartier populaire parmi les étudiants et les nouveaux habitants, est presque désert pendant les vacances.
La stratégie de voyage
Les voyages en train avant Noël sont soigneusement planifiés. Cette année, la Deutsche Bahn prévoit 450 000 passagers par jour et met en circulation des trains plus longs. Au bureau, nous nous interrogeons sur les horaires de nos trains respectifs. Les sites web nous guident pour réserver des billets au meilleur prix. J’ai acheté mon billet à la mi-novembre, principalement pour assurer ma place assise. Seuls les amateurs voyagent sans réservation à ce stade.
À 6 h 45, j’arrive à la gare principale de Zurich et commande un flat white, une petite tradition lorsque je voyage en train. Quinze minutes plus tard, mon train IC démarre. Les navetteurs sortent leur ordinateur portable et commencent à travailler. À Bâle, je change pour l’ICE, avec Freiburg im Breisgau comme première escale. Des jeunes montent dans le train, leurs sacs à dos de randonnée et leurs cadeaux à la main. L’Allemagne rentre chez elle, apportant avec elle quelques souvenirs.
Les émotions du trajet
Mon voyage dure neuf heures. À peine la moitié des sièges sont occupés, je fais partie de la première fournée, avant que le reste du pays ne se redistribue au cours des jours suivants. Nous traversons des champs, des sites industriels et des paysages vallonnés. À l’extérieur, le ciel est gris et la pluie tombe.
Les longs trajets en train encouragent à la réflexion, car ces voyages vers la maison ne sont pas toujours simples. Arriver signifie retrouver son enfance. Les mères demandent à leurs filles adultes si elles sont bien couvertes, et l’oncle Heinz s’interroge pour la énième fois sur le fait que son neveu n’a toujours pas de petite amie.
Les aléas des voyages
À 10 h 39, j’envoie un message à ma mère sur WhatsApp : « J’ai un peu de retard. » Peu après Mannheim, nous devons faire un détour en raison de réparations sur la ligne, entraînant 45 minutes de retard. Je vais rater ma correspondance à Brême.
Voyager avec la Deutsche Bahn présente des risques. Les pannes d’aiguillage, les absences de personnel, les retards de départ, les vaches sur les voies : la liste des raisons de retard est interminable. Celui qui a de la malchance risque d’arriver trop tard pour l’ouverture des cadeaux. Tout le monde espère que ce ne sera pas le cas cette fois.
Une ambiance festive
Je me souviens d’un incident l’année dernière à Mannheim, où un passager a failli rater son train en se glissant dans le wagon juste avant la fermeture des portes. Cela a suscité une réprimande de la part du contrôleur qui l’a averti des dangers. Ce fut un échange houleux, un véritable clash de Noël sur rails.
Après avoir quitté Münster, le paysage devient plus familier. Nous passons devant de vieilles fermes à colombages et des silos. À Noël, on devient plus vulnérable, dit-on. Les disputes peuvent éclater au sein des familles lorsque les attentes sont élevées. Les fêtes doivent être parfaites.
À la recherche d’un foyer
Au fond, chacun cherche le même objectif : un lieu où passer quelques jours au chaud, entouré de gens qui nous aiment tels que nous sommes. Ceux qui préparent des plats et se réjouissent de notre arrivée. Noël signifie également la fin d’une année. En cette période, on prend conscience de la fragilité du bonheur, de la famille et de la vie. Et parfois, cela inclut aussi la difficulté du voyage vers ce lieu.
Cette année, selon un sondage, 7 % des gens en Allemagne passeront Noël seuls, un chiffre qui monte à 11 % chez les personnes âgées. « Qui n’a pas de maison en ce moment, ne construit plus, » dit un poème de Rainer Maria Rilke. Avant la veille de Noël, on pourrait dire : qui ne prend pas le train maintenant, doit avoir un bon plan pour les jours à venir.
Un voyage partagé
Dans le train, je ressens une ambiance particulière. Une combinaison d’excitation pour ces quelques jours de détente et de mélancolie. Le soir, alors qu’il fait nuit, des bandes orange s’allument au-dessus des sièges dans l’ICE. Je choisis toujours le calme, mais lorsque l’on se laisse emporter par l’esprit de Noël, tout semble plus silencieux.
À Brême, je change pour le S-Bahn en direction du nord-ouest. Ici, les gens parlent comme je m’en souviens, avec des « Moin » et des « Jo ». Je regarde par la fenêtre, essayant d’apercevoir l’intérieur des maisons que nous croisons. Pendant une seconde, je jette un œil sur la vie des autres, observant des étagères et des lampes. Pendant quelques jours, des millions de personnes font en gros la même chose. Pourtant, chaque famille célèbre Noël à sa manière, ce qui donne un sens différent à cette fête pour chacun. Étrangement fascinant.
Retour au foyer
À 17 heures, ma mère m’envoie une photo du feu dans notre cheminée. Quelques minutes plus tard, je descends du train. Je tire mon rouleau-bagages sur le pavé. Le bus qui me ramène chez moi m’attend déjà.