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La ville de Gennevilliers, située dans les Hauts-de-Seine, s’est engagée dans un projet ambitieux visant à offrir une alimentation saine, locale et biologique à ses habitants. Ce projet repose sur le rachat d’une ferme maraîchère pour devenir une ferme communale, mais il rencontre des difficultés liées au manque de candidats pour diriger cette exploitation agricole.
Un projet pour reconnecter la ville à l’agriculture locale
Gennevilliers, commune de 50 000 habitants en petite couronne parisienne, a choisi de racheter une ferme maraîchère afin d’en faire son propre grenier agricole. Patrice Leclerc, maire communiste, souligne que « l’objectif de ce rachat est de recréer du lien entre la ferme et les habitants ».
Cette ferme, située à Argentières en Seine-et-Marne, à environ 1 h 20 de Gennevilliers, s’étend sur 36 hectares et cultive une quarantaine de variétés de fruits et légumes. Actuellement exploitée en agriculture raisonnée, elle devrait être convertie au bio pour répondre aux exigences de qualité et de durabilité.
Une alimentation bio et locale pour la restauration collective
Les produits de la ferme seront principalement destinés à approvisionner la cuisine centrale de Gennevilliers, qui prépare 15 000 repas par jour pour la restauration collective de la ville et de trois communes voisines. Au départ, environ 2 000 repas, notamment pour les crèches, le self municipal et les seniors, bénéficieront des produits issus de cette ferme. D’autres fournisseurs continueront d’alimenter la cuisine centrale pour compléter l’offre.
Assurer la sécurité alimentaire malgré les défis logistiques
La mairie est consciente des contraintes liées à ce projet, notamment en ce qui concerne les coûts et la complexité du transport des denrées dans une zone urbaine dense. Le prix des produits ne sera pas nécessairement inférieur à celui des fournisseurs actuels, mais l’intérêt réside dans la stabilité des tarifs. Patrice Leclerc explique : « ce rachat est une façon de ne pas se soumettre à la loi de l’offre et de la demande, en bénéficiant de prix fixes toute l’année », insistant sur la nécessité de garantir la sécurité alimentaire des habitants.
Par ailleurs, ce type de projet s’inscrit dans une dynamique nationale avec environ 150 fermes communales en France, parfois à grande échelle comme celle de Toulouse-Candie qui cultive 250 hectares. Ces initiatives ont connu un nouvel essor après la pandémie de Covid-19, qui a mis en lumière la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement longues et éloignées.
Yuna Chiffoleau, directrice de recherche en sociologie à l’Inrae, souligne que « comme lors de chaque crise, les circuits courts et de proximité ont suscité un regain d’intérêt pendant l’épidémie. Collectivités et citoyens ont pris conscience de la vulnérabilité liée aux approvisionnements issus de filières longues ».
Une réponse à la loi Egalim et un engagement pour l’agriculture paysanne
La loi Egalim, adoptée en 2018, impose aux collectivités de proposer au moins 20 % de produits biologiques dans la restauration collective. Gennevilliers dépasse déjà cette exigence avec plus de 30 % de produits bio. Le projet de ferme communale s’inscrit donc dans cette volonté d’encourager une alimentation saine et durable tout en soutenant une agriculture locale et paysanne.
Un défi majeur : la pénurie d’exploitants
Pour mener à bien cette exploitation, Gennevilliers recherche un agriculteur avec lequel s’associer. La commune a investi 1,1 million d’euros pour l’acquisition du foncier et des bâtiments, tandis que l’exploitant devra racheter l’entreprise pour 450 000 euros, avec une participation communale. L’agriculteur ne sera pas salarié de la mairie et continuera également la vente directe existante. La ville étudie des solutions pour sécuriser l’approvisionnement malgré cette indépendance.
Ce partenariat vise à maintenir une agriculture paysanne sur le territoire, mais le projet accuse un retard significatif. L’exploitant initialement désigné a quitté le projet, obligeant la commune à relancer un appel à manifestation d’intérêt qui se termine en juillet.
Patrice Leclerc déclare : « L’obstacle principal pour un tel projet agricole est de trouver des exploitants prêts à reprendre l’exploitation ». La population agricole en France a considérablement diminué et vieillit, rendant difficiles les reprises d’exploitation. Yuna Chiffoleau souligne le paradoxe observé dans d’autres projets similaires : « Des collectivités peinent à trouver des candidats alors que des porteurs de projet cherchent des terres pour s’installer ». Les freins principaux sont la localisation, l’exigence d’indépendance de l’exploitant et le manque d’information.
Si aucun exploitant n’est retenu d’ici juillet, Gennevilliers envisagera une révision en profondeur de ce projet d’envergure.