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Le cinéma italien bénéficie depuis toujours de financements publics, un système qui, dans certaines limites, apporte une richesse culturelle essentielle hors de l’influence d’Hollywood. Cependant, en 2024, ce mécanisme suscite débats et polémiques, notamment autour des accusations d’influence politique et des choix de subventions. L’acteur Elio Germano, au cœur de ces discussions, incarne bien ces tensions, tant par ses films que par ses prises de position critiques envers le ministère de la Culture.
Un système de financement public sous le feu des critiques
Le soutien étatique au cinéma italien vise à promouvoir des œuvres qui reflètent la culture et l’identité nationales. Pourtant, chaque changement politique entraîne son lot de accusations. Depuis l’arrivée au ministère de la Culture d’un représentant du centre-droit, des voix s’élèvent, à l’image d’Elio Germano lors de la cérémonie des David di Donatello, pour dénoncer un prétendu « démantèlement » du cinéma italien par une politique restrictive ou partisane. Germano a notamment critiqué le gouvernement en évoquant une sorte de « clan » imposant ses hommes dans les postes clés.
Face à ces allégations, le ministre Alessandro Giuli a répondu, déclenchant un échange tendu entre artistes et autorités.
Les chiffres des financements publics : entre réalité et polémique
Pour mieux comprendre ce débat, il est utile d’examiner les données disponibles, en se concentrant sur les financements « sélectifs », distincts des aides automatiques destinées à la plupart des productions. Par exemple, le film Palazzina Laf, avec Elio Germano, a reçu 200 000 euros en 2021. Cette œuvre, qui relate un procès pour harcèlement moral dans une grande entreprise, a valu à Germano un David di Donatello en 2024.
Autre exemple notable : Berlinguer – La grande ambizione, un film sur le leader communiste Enrico Berlinguer, a bénéficié de 435 000 euros en 2023, sous le gouvernement Meloni. Ce soutien financier à des films à forte connotation politique illustre que les aides publiques ne se limitent pas à un seul camp politique.
À cela s’ajoutent des subventions pour un documentaire sur Berlinguer, Prima della fine. Gli ultimi giorni di Enrico Berlinguer, qui a reçu 15 000 euros en 2022 et 25 000 euros en 2023.
Par ailleurs, Il signore delle formiche, un film d’essai de 2023, a obtenu 300 000 euros en 2021.
Le financement des nouveaux talents : un enjeu d’équité
Au-delà des cas individuels, le débat se concentre aussi sur les aides destinées aux premières et deuxièmes œuvres des réalisateurs, un segment important pour le renouvellement artistique. Entre 2021 et 2023, plusieurs acteurs renommés sont passés à la réalisation en bénéficiant de financements conséquents :
- Margherita Buy pour Volare : 150 000 euros en 2023
- Neri Marcorè pour Zamora : 250 000 euros
- Jasmine Trinca pour Marcel! : 490 000 euros en 2021
- Luca Zingaretti pour La casa degli sguardi : 250 000 euros en 2024
Cette tendance soulève une question d’équité : les financements profitent souvent à des artistes déjà bien implantés, possédant un réseau solide et déjà reconnus, ce qui pourrait freiner la découverte de nouveaux talents moins établis.
Des financements dans des projets engagés et inclusifs
Malgré les critiques, de nombreux projets financés abordent des thématiques importantes et inclusives. Par exemple, Il ragazzo dai pantaloni rosa, de la jeune réalisatrice Margherita Ferri, a reçu 200 000 euros en 2025. Ce film raconte l’histoire vraie d’Andrea Spezzacatena, victime de harcèlement homophobe qui s’est suicidé à 15 ans en 2012.
Acclamée par le public, cette œuvre a été l’un des films les plus vus en 2024, démontrant que les aides publiques peuvent soutenir des contenus forts et socialement pertinents.
Ces exemples montrent que les subventions publiques continuent de jouer un rôle crucial dans la vitalité et la diversité du cinéma italien, quelle que soit l’orientation politique du gouvernement en place.
Appels à la concertation et à la fin des polémiques
Face à la montée des tensions, une centaine d’acteurs et réalisateurs, dont Gabriele Salvatores et Luca Zingaretti, ont adressé une lettre ouverte au ministre de la Culture demandant des rencontres avec les associations professionnelles du secteur. Ils appellent à la fin des polémiques stériles et des attaques envers les critiques légitimes, telles celles portées par Elio Germano et Geppi Cucciari.
Notons que Salvatores, réalisateur oscarisé, a lui-même bénéficié de 620 000 euros de financements sélectifs en 2022 pour son film Il ritorno di Casanova, qui a généré environ 760 000 euros au box-office italien.