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Le pape François célèbre la piété populaire en Corse

by Sara
Le pape François célèbre la piété populaire en Corse
France

Le décor était minutieusement choisi. Sous la statue de Napoléon, qui domine le Casone, cette immense esplanade en surplomb d’Ajaccio (Corse-du-Sud), trône une grande croix en chêne. Six mètres de haut pour plus de 400 kg. Sa base prend la forme d’une ancre, faisant écho à l’autel représentant la coque d’un navire. Autant de symboles de l’espérance, dans le monde chrétien. Peut-être aussi une allégorie de cet ancrage de la foi en Corse, que le souverain pontife met un point d’honneur à célébrer, ce dimanche, face à un théâtre de verdure noir de monde. Plus de 8 000 fidèles sont présents. Jamais, dans toute l’histoire de l’île, un pape n’avait foulé le sol insulaire. « François a choisi l’endroit où la piété populaire est la plus visible, aujourd’hui en France, pour faire ce voyage et délivrer son message », observe un fin vaticaniste, dans la foule.

Les confréries, au cœur de la piété populaire

En arrivant sur la place où il devait présider la sainte messe, l’évêque de Rome avait ressenti cette ferveur. Une acclamation continue depuis la place Miot, d’où le souverain pontife arrive à bord de sa papamobile. Trois cents choristes sont là pour unir leur voix sous le dôme installé sur la place. Ils viennent de toute la Corse, qu’ils chantent dans les chœurs des conservatoires ou ceux des paroisses. Derrière l’autel, les confréries mettent aussi du cœur à l’ouvrage, donnant à entendre, à travers leurs chants polyphoniques, « la voix d’une foi vivante », avance Christian Andreani, prieur de la confrérie Saint-Martin de Patrimonio (Haute-Corse).

« Le chant sacré est consubstantiel de la culture populaire en Corse, poursuit ce féru de l’histoire chrétienne. C’est l’héritage d’un riche patrimoine immatériel qui aurait pu disparaître au fil des siècles mais qui, au contraire, est aujourd’hui plein de vitalité. » Ces communautés de laïcs – l’île en compte une centaine qui rassemblent quelque 3 800 confrères – mettent un point d’honneur à rehausser de leurs chants sacrés les moments clés de la visite papale. Pour mieux illustrer « le lien indéfectible entre la musique et la spiritualité corses », avance Jean-Baptiste Luciani, pilier de la confrérie Saint-Antoine de Bastia. Le chant, loin d’être une simple tradition, est un vecteur essentiel de la foi, un moyen d’exprimer notre dévotion et notre identité.

Une visite marquée par la piété populaire

Dès son arrivée, à neuf heures pétantes, sur le tarmac de l’aéroport d’Ajaccio, le Saint-Père a été accueilli par le groupe Caramusa sur les notes de « A Nanna di u Bambinu », aux côtés du ministre – démissionnaire – de l’Intérieur et des Cultes, Bruno Retailleau. Écrite en 1873 par un prélat corse, Mgr Paul-Matthieu de la Foata, cette berceuse dédiée à la naissance de l’Enfant Jésus a traversé les siècles pour devenir un air populaire et un emblème de Noël sur l’île. Un symbole de cette « piété populaire », ces gestes simples, petits rites, images pieuses et cultes instinctifs, parfois d’origine païenne, que François est venu adouber dans l’île, et constitutifs à ses yeux de l’unité des chrétiens dans le monde.

Ici, la venue du pape est vécue comme une reconnaissance de ces religiosités populaires longtemps dénigrées par l’Église, et que l’évêché s’est employé à réinvestir. Emblème de cette relation renouvelée, les confréries, aux premières loges pour animer les processions et le calendrier liturgique, sont « le pilier de cette religiosité populaire », relève Anghjulina Antonetti, enseignante-chercheuse à l’université de Corte (Haute-Corse), spécialiste de l’histoire religieuse corse. Elles jouent un rôle majeur dans l’expression collective de la foi et engagent les laïcs bien au-delà de la simple observance.

Une laïcité « à la corse »

En venant saluer cette société empreinte de religiosité, le pape envoie aussi un message à une France toujours plus sécularisée. Le cardinal Bustillo se plaît d’ailleurs à évoquer une laïcité « à la corse » pour définir cette pratique au confluent du culturel et du cultuel qui tranche avec « les crispations, conflits, tensions sociales que l’on peut parfois observer sur d’autres terres », estime l’évêque d’Ajaccio.

Dans un discours aux accents très politiques, en clôture du colloque, le souverain pontife a défendu un « concept de laïcité qui ne soit pas figé, mais évolutif et dynamique, basé sur une coopération constante entre les autorités civiles et ecclésiastiques pour le bien de la communauté, chacune restant dans les limites de ses compétences et de son espace. Benoît XVI l’a affirmé : “une saine laïcité signifie libérer la religion du poids de la politique et enrichir la politique par des apports de la religion, dans un entrelacement, un dialogue ouvert et constant”.

Plus de 300 élus corses ont accompagné le périple du souverain pontife en papamobile.

En Corse, le pape François a célébré une messe devant plus de 8 000 fidèles.

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