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Le Conseil d’État a confirmé, jeudi dernier, l’interdiction d’utiliser la langue corse dans les débats à l’assemblée de Corse, un revirement majeur qui cristallise les tensions entre défenseurs de la langue locale et institutions françaises. La décision, consultée par l’AFP, concerne une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par la Collectivité de Corse (CDC), qui contestait cette interdiction.
Décision du Conseil d’État et ses implications
Dans son arrêt, le Conseil d’État a estimé qu’il n’y avait pas lieu de transmettre la question au Conseil constitutionnel, rappelant que la Constitution française stipule que « les particuliers ne peuvent se prévaloir, dans leurs relations avec l’administration et les services publics, d’un droit d’usage d’une langue autre que le français ». En conséquence, la pratique de la langue corse lors des sessions de l’assemblée n’est pas compatible avec la Constitution, et le pourvoi de la Collectivité n’a pas été retenu, notamment pour absence de moyens sérieux.
Réactions des élus corses et revendications
Les élus autonomistes, notamment Gilles Simeoni, président du conseil exécutif de Corse, et Marie-Antoinette Maupertuis, présidente de l’Assemblée de Corse, ont exprimé leur déception. Dans un communiqué, ils ont « pris acte » de cette décision qui, selon eux, « condamne la langue corse à être bannie de l’espace public ». Ils dénoncent une « mesure à rebours des droits fondamentaux » et de la majorité écrasante des Corses qui souhaitent voir leur langue reconnue officiellement.
Les responsables politiques ont annoncé leur intention de déposer un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Ils considèrent que cette décision contredit les aspirations majoritaires des Corses et encouragent le processus de révision constitutionnelle en vue de conférer à la langue corse un statut officiel, garantissant son utilisation dans tous les actes de la vie publique.
Historique et contexte juridique
Ce litige remonte à plusieurs années. En novembre 2024, la cour administrative d’appel de Marseille avait rejeté l’appel de la Collectivité contre le jugement du tribunal administratif de Bastia, qui avait annulé en mars 2023 les délibérations autorisant l’usage du corse dans l’administration. Ces délibérations, incluant l’article 16 du règlement intérieur du conseil exécutif et l’article 1er de celui de l’Assemblée, avaient été jugées contraires à l’article 2 de la Constitution, qui impose l’usage du français dans la vie officielle.
Ce conflit juridique reflète la tension persistante entre la volonté locale de faire reconnaître le patrimoine linguistique de la Corse et le cadre légal français, strict quant à l’usage des langues régionales dans l’administration et la sphère publique.
Perspectives et enjeux futurs
Les acteurs autonomistes continueront leur combat, espérant faire évoluer le cadre législatif pour permettre la reconnaissance officielle du corse. La perspective d’une révision constitutionnelle apparaît comme une étape cruciale dans cette démarche, notamment pour garantir le statut de langue officielle à cette langue régionale, facilitant son usage dans les écoles, les institutions et l’espace public.